Ben Young nous immerge dans l’Australie de la fin des années 80 dans ce qui aurait pu être l’adaptation d’un fait divers. Mais pas d’encart précisant que le film est inspiré de faits réels. Non, « Love Hunters » est un scénario original mais la triste et malheureuse banalité du récit dans lequel nous plonge le cinéaste aurait pu nous laisser croire à une histoire vraie. Dès les premières images, l’australien nous met mal à l’aise avec d’un côté sa façon de filmer les banlieues pavillonnaires australiennes avec de superbes travellings au ralenti. Un paradis en totale opposition avec ce qui se trame dans une de ces maisons à priori anodines filmée avec un réalisme qui fait froid dans le dos. Sa caméra se pose alors au plus près d’un couple de psychopathes kidnappant et séquestrant des jeunes lycéennes. Dès lors, on aura de cesse de se rendre compte que les apparences sont souvent trompeuses.
On pense beaucoup au chef-d’œuvre de son comparse australien Justin Kurzel, « Les Crimes de Snowtown », avant qu’il ne mette en scène « Assassin’s Creed ». Même façon de filmer ces banlieues endormies et leurs hôtes malades où l’horreur humaine se terre partout. L’intelligence du script est de se focaliser autant sur l’histoire et la psychologie de la victime que celle du couple de ravisseurs. Cela entraîne une empathie logique pour la première mais pose également des questionnements sur la raison des actes des seconds. S’il ne les excuse bien sûr jamais, cela nous met dans un étau implacable qui se resserre autant émotionnellement que physiquement (grâce à la manière dont il cadre l’intérieur de la maison devenue prison). A ce titre, le personnage d’Evi est le plus intéressant et Emma Booth parvient à rendre toute l’ambiguïté d’une femme partagée entre l’amour qu’elle éprouve pour son compagnon et la terreur de l’emprise qu’il a sur lui. Un personnage à la psyché passionnante et un rôle de psychopathe au féminin rarement vu sur grand écran.
Le réalisateur frappe également très fort lors des scènes de tentatives d’évasion où le suspense qu’il entretient nous colle littéralement à notre siège. On est au plus près de la victime, on a peur pour elle, on a peur avec elle. La tension est entretenue durant tout le long-métrage et l’atmosphère qu’il parvient à mettre en place est suffocante. Pas une seconde on ne décroche d’un suspense qui nous attrape dès le rapt de Vickie. Surtout qu’on est n’est jamais vraiment sûr de l’issue et de la direction que va prendre « Love Hunters ». Même dans les dialogues entre le couple, on sent quelque chose de vénéneux, digne des meilleurs thrillers. Alors bien sûr c’est parfois un peu complaisant dans la violence et le glauque et on peut reprocher une grosse facilité de scénario sur la fin. N’empêche ce thriller psychologique venu des antipodes vous prend pour ne plus vous lâcher et marque durablement la mémoire.