Ce qui frappe immédiatement dans Love Hunters, c’est l’élégance avec laquelle le réalisateur australien Ben Young met en image le récit. Il ne suffit d’ailleurs que des quelques minutes d’ouverture – sublimes ralentis dévoilant dans une même séquence chasseurs et proies – pour se rendre compte que, malgré l’âpreté du scénario, le film ne négligera pas la beauté des plans. Une beauté sauvage s’exprimant autant dans la puissance magistrale des cadrages que dans la chaleur étouffante de la photographie. Jamais artificiels, les choix de mise en scène contribuent très tôt à installer un sentiment de malaise, jouant notamment habilement sur le contraste entre la quiétude extérieure et la violence intérieure. En reléguant constamment la violence hors champ, le cinéaste évite aussi intelligemment de tomber dans une complaisance malsaine qui aurait certainement amoindri son propos. Pour autant, l’absence de scènes chocs explicites n’enlève en rien l’impact que peuvent avoir certaines séquences, ni la tension extrême qu’elles peuvent générer. Un véritable tour de force !


La maîtrise qui émane du film n’est toutefois pas uniquement formelle puisque le scénario, également signé Ben Young, offre un regard singulier sur une histoire de kidnapping somme toute classique. En se concentrant presque exclusivement sur les bourreaux, le script dresse effectivement le portrait complexe et fascinant d’une femme brisée par l’existence, manipulée par un mari dont elle est finalement la première victime. Véritable révélation du film, Emma Booth l’incarne avec une sincérité désarmante. Tour à tour cruelle, touchante et vulnérable, l’actrice ne fait qu’un avec son personnage, délivrant une prestation bluffante de bout en bout, la plus belle de sa carrière sans aucun doute. A ses côtés, Stephen Curry ne démérite absolument pas, se plongeant lui aussi de manière convaincante dans la peau d’un personnage, certes moins complexe, mais tout aussi ambitieux à incarner. Enfin, Ashleigh Cummings complète ce brillant tableau sans défaillir le moins du monde. Signalons aussi pour terminer la qualité du travail sonore, un élément qui participe grandement à l’ambiance du long-métrage.


Avec Love Hunters, Ben Young affiche donc une incroyable maîtrise pour ses débuts au cinéma. A travers cette sordide histoire de kidnapping, le réalisateur/scénariste australien dresse un portrait de femme complexe et sans concession, transcendé par la performance magistrale d’Emma Booth. Usant brillamment du hors champ pour suggérer la violence la plus extrême, le film se vit comme une gigantesque claque. Le genre de claque dont on ne se remet pas facilement.


https://cinerama7art.com/2017/12/02/critique-love-hunters/

Wolvy128
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le 2 déc. 2017

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