Critique philosophique, personnelle et très lacunaire

Alerte spoiler : les spoilers sont disséminés un peu partout ici.


« It’s funny I used to be so concerned with who I was and what I wanted to be and.. now that I’ve access to the furthest reaches of my brain I see things clearly and realize that what makes us us, it’s primitive ; they’re all obstacles ; does that make any sense ? » 40’’


Cette phrase a provoqué en moi un bond d’intérêt pour le film. Elle a appelé de profondes volontés, des profonds combats, questionnements, pensers existentiels.
Suis-je un fan de Lucy ? J’ai failli dire oui. Je ne comprends pas Luc Besson. Je suis très étonné qu'il ait pu avoir des idées aussi géniales.
Comment peut-on avoir une si bonne vision de la Vérité, d’une vérité peut-être, et gaspiller de nombreuses minutes au divertissement ? Le pouvoir de Lucy ne sert pas à prendre plaisir en conduisant une voiture à contresens dans les rues bondées en évitant toute égratignure. Pire que cela : elle peut tout à fait faire le bien en un instant, et redonner vie et bonheur à tous ses ennemis et tous ces corps morts qui paillassonnent sont chemin. Enfin : le concept pouvait très bien s’épanouir sans violence, sans ces enjeux d’un divertissement gratuit et presque idiot. Si ce film se veut blockbuster pour sa réussite, il se fera deux camps de spectateurs : ceux qui viennent pour les super-pouvoirs et ceux qui sont soufflés de recul et de fascination envers la vision apportée. Il ne peut se former d’entre-deux consistant : les dérives faciles de divertissement servent l’opposé des intérêts informatifs, conceptuels du film.
Je dirai que ce film est génial. Et quand je dirai cela je ne penserai qu’au concept, qu’aux idées, l’Idée du film. L’action est pour la plupart à jeter ; une partie d’elle sert néanmoins à la démonstration de la grandeur des pouvoirs de Lucy, qui donnent vie à l’Idée.
Lucy pouvait tout à fait, pour récupérer la mallette dans le couloir de l’hôpital, le faire en moins de cinq secondes : – écarter les hommes, – prendre la mallette, – faire demi-tour. Elle pouvait très bien sécuriser d’elle même la salle finale. Elle pouvait éviter de renverser des voitures de police ; éviter de nombreuses morts….
Tout aurait été si beau, si émouvant de voir tout en splendeur l’effet de ses pouvoirs ; de la voir passer fluidement et efficacement, manifestement sans heurter personne, sans blesser. Ses pouvoirs sont largement suffisants pour éradiquer bien vite toute forme d’opposition.
Au lieu de cela Besson ne peut s’empêcher de chercher la sensation.
L’attachement que j’ai à présent pour ce film – que dis-je, pour ce concept – est purement idéal, conceptuel, existentiel ; très peu sentimental. « Maintenant que j’ai accès aux plus lointains confins de mon cerveau je vois les choses clairement et réalise que ce dont nous sommes faits, c’est primitif ; ce ne sont que des obstacles » s’il vous plaît.
« Peut-on se libérer de sa culture ? » était mon problème de raisonnement philosophique par une matinée de canicule, à l’examen du bac – il y a deux mois et demi. J’y ai écrit que la philosophie avait le pouvoir de nous libérer de la culture et, ici, nous pouvons le voir sous un angle un petit peu changé : la culture est un **obstacle** / « *they’re all obstacles* » / s’en libérer complètement fait de nous une machine… / *Lucy ne ressent pas de sentiments* / – une machine à *objectivité et vérité* !….
…….Le sens de la vie est-il réellement de transmettre de l’information ? Lucy ne pouvait-elle pas, au lieu de tout cela, analyser le monde, écrire des essais, préparer la résolution et la terminaison de la faim, de la guerre, de la misère, de l’inégalité, du capitalisme, du racisme, des tensions, de la dépression ; de la société, de l’idiotie, de la consommation, de la pollution ; – du système ; – de l’illusion ?
Ici je crains de faire un défaut. J’ai bien compris que Lucy finit par emmagasiner toutes les informations factuelles de l’Histoire de l’Univers et du Temps, et les offrir à la science ; – mais ce ne sont que des informations brutes – non traitées – pas de vérité ! – pas d’objectivité ! – pas de philosophie ! ; – ou ai-je mal compris ?
Voilà mon différend en ce qui concerne la vision présentée dans Lucy. Je l’aime – contrairement à l’action – mais il se peut bien qu’au final je n’y adhère pas totalement.
Complétons plus soigneusement la critique. Tout le film ou presque est bien amené, rythmé, monté. Je n’ai pas trouvé quelque chose d’exceptionnel à la photographie bien que plusieurs plans sont très jolis, en particulier de gros plans sur le visage et les cheveux du personnage principal. Je n’ai pas trouvé défaut dans le jeu de l’actrice ; la voir en Lucy est captivant – je veux dire quand on la regarde en rapport avec les idées qu’elle incarne, ce qu’est son pouvoir. L’action est prenante et divertissante (bien que j’aimerais qu’elle ne soit pas là). Tout cela jusqu’à la scène finale, sur laquelle j’ai moins d’arrêtés tels que ceux-ci ; je m’abstiendrai simplement. Excusez ce paragraphe qui ne présente aucun argument mais seulement un tour rapide de point de vue. Il contribue à justifier la note que j’attribue.
Ce que j’aime dans ce film ne concerne pas ou peu le cinéma. Certes, le cinéma aide bien à faire passer le concept et à le concrétiser ; mais j’ai peu à dire sur le cinéma de Luc Besson ; j’ai eu à dire sur des idées – sur de la philosophie.
Philosophie : pas science-fiction ; j’ai bloqué – tout en acceptant pour la suite – sur tous les pouvoirs SF qu’a Lucy. Cela ne fait pas de sens. C’est de la liberté insensée prise par le réalisateur. Le cinéma sert à concrétiser le concept de Lucy, si l’on enlève la science-fiction. Ce défaut est parallèle à celui incarné par l’action gratuite. Ces deux défauts forts d’être ensemble tâchent assez salement la vision que j’ai du film ; – et ce qui ressort de tout cela : c’est dommage.
Besson fait de ce film une imperfection gênante et triste. Le concept allait faire de Lucy un film d’utilité publique : c’est gâché. L’opportunité était si belle….
Templitude
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le 3 sept. 2017

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