Le film démontre un affrontement entre deux sociétés qui apparaissent. La société d’ordre, bourgeoise, symbolisée par la police et l’Etat. Ces entités mettent en place tous les moyens possibles pour trouver l’auteur des crimes. Cette quête va cependant se révéler impossible sans un autre aspect de la société et de sa ville.
C’est là qu’apparaît le monde du crime, dans un aspect plus sombre, plus caché, mais tout aussi vivant dans la nuit profonde. La cigarette est évidemment omniprésente dans cette société.
Un aspect souterrain nous accompagne tout au long de l’oeuvre, deux mondes s’opposent dans la ville moderne du XXème siècle. Celui des honnêtes gens qui vivent dans leurs immeubles, en hauteur, avec les enfants qui jouent sous le regard bienveillant de tout le voisinage : dans la cour ou la cage d’escalier qui n’est qu’un point de passage vers le nid familial sécurisé après le retour des enfants de l’école. L’aspect inquiétant né a posteriori à travers la rue qui symbolise la frontière vers un autre monde : celui des caves, des quartiers décadents, de la contrebande, en somme celui de la mafia.
Les clochards des rues jouent un rôle particulier. Ce sont les sentinelles de la frontière entre ces deux mondes. Ils seront mis à contribution dans la recherche et la capture du tueur pédophile. Ils sont le symbole des moyens utilisés par le monde du crime. Leurs capacités sont moins développées, mais font leurs preuves. Finalement c’est le monde du crime qui va réussir à mettre la main sur celui qui est le véritable auteur de toutes ces disparitions. La police l’identifie, c’est le travail en amont, et ce sont les clochards qui opèrent sur le terrain.
Dans l’oeuvre, vers sa fin, un procès est organisé. Celui-ci est l’occasion pour Lang de dénoncer les mouvements de foule, où la réflexion disparaît, pour laisser place au lynchage. Le monde du crime décide de juger le tueur pédophile parce qu’il empêche le développement économique de ses réseaux. Ils décident de le juger de manière expresse en lui offrant un procès expéditif.
Un défenseur, brillant au demeurant, lui est donné gratuitement : mais son sort est déjà scellé. Le peuple veut sa mort. Une mère s’exprime : elle l’accable, elle est la bonne conscience. Néanmoins à la fin la justice étatique et son monopole de la violence légale intervient. Le véritable procès est opéré. La scène finale ne donne pas la solution, mais ne fait que poser des questions. Magistral.
La critique complète ici : https://elogedelacontrainte.wordpress.com/2017/11/06/m-le-maudit-ou-lame-des-foules/