Ma Loute c'est tu l'attends ou tu l'attends pas, Ma Loute c'est Dumont, Dumont c'est le nord, le nordiste, c'est le patient, le gars qui te filme le même paysage durant des plombes puis tu vois finalement apparaître au loin un p'tit bonhomme qui grandi de plus en plus au fil qu'il avance vers la caméra...
T'as pas l’impression de lire du Luchini là ?
Voilà donc Ma Loute quoi, le premier film comique de Dumont, alors qu'on avait pris l'habitude de ne voir en quelque sorte que le même film depuis La vie de Jésus en boucle disposant juste de différents sujets à chaque fois, depuis son incursion sur le p'tit écran avec p'tit Quinquin, le monsieur s'est découvert une nouvelle passion, la comédie. Mais là ou en format court ça se regarder plutôt vite, il faut bien le dire ici, les deux heures paraissent un peu longuette par moment, et ce même si c'est un régal de suivre une enquête menée par des flics irrésistibles et incompétent au possible, les Laurel et Hardy de Dumont.
C'est sur la Baie de la Slack dans le Nord de la France que Bruno Dumont pose sa caméra, décidément il ne quittera jamais son patelin brumeux et affrontera le vent jusqu'à la fin. Caméra fixe, lumière gracieuse tout comme la photo immaculée qui arrive à rendre une mer déchaînée par le vent et un bout de plage miteux en tableau vivant. Il nous fait pour une fois suivre une petite trame, même si elle n'aura aucune conclusion spéciale, autour d'une famille cannibale, c'est ici avant tout une histoire de famille de péteux ayant les problèmes les plus cons de la terre. L'une à la joie et à la tristesse démesurée dont la fille est un garçon ou l'inverse... un autre bossu qui semble disposer d'une gravité vis à vis du sol plus importante que la moyenne avec un phrasé d'une lenteur amusante, sa femme au visage blanc comme sa robe qui doit s'enticher d'un frère complétement timbré qui se fait disparaître lui même et bien sur il faut citer Ma Loute, tête atypique qui de son standing de petit marin aidant à traverser la baie aux gens tombera amoureux de la fille garçon qui vient elle ou lui d'une famille aisée.
T'as pour une fois des acteurs célèbrent chez Dumont, t'as du Fabrice Luchini qui n'en revient toujours pas d'avoir incarné ce personnage, si loin de lui il arrive pourtant à nous régaler d'un simple plissement de yeux. Juliette Binoche au summum du possible de l’hystérie, fabuleuse, une Valeria Bruni Tedeschi plutôt dans la retenue de par son personnage très droit, Jean-Luc Vincent qui comme Binoche retrouve pour la seconde fois Dumont nous effraie de ses yeux écarquillés, la folie à l'état pur. Ensuite nous pouvons également compter sur les jeunes principaux on va dire du film, Brandon Lavieville et Raph, couple improbable et poétique tout comme le film mélangeant improbabilités et poésie. Je ne manquerais pour rien au monde de citer les policiers, qui déjà grâce à la bande annonce laissaient présager une rigolade venant du cœur, Cyril Rigaux, rouquin maigrichon excellent aux cotés d'un mammouth qui ferait passer notre Depardieu pour un poulet de basse cour, le fantastique Didier Desprès, tout est réuni pour le rendre attachant et irrésistible, entre sa voix aigu dont on ne comprend quasiment rien et ses bruit de caoutchouc quand il marche, juste culte !
Une première comédie réussie donc pour ce cher Dumont, bien qu'un peu longue et sans véritable sujet au fond, mais ça il fallait si attendre au vu de sa filmographie, il nous amuse d'un sur jeu évidement voulu, pousser à outrance pour rendre le tout fou et nouveau était un pari osé, et ça a payé.