L'Amérique est trop grande pour n'être capable du meilleur comme du pire, mais c'est beau quand elle arrive au premier cas en restant fidèle à elle-même. Ma meilleure ennemie est pour une fois un titre français plutôt bien trouvé, qui contient la dose de romance et d'Ode to my Family (chanson que le mélange astucieux de la musique de Williams avec des chansons préexistantes ne contient pas) du titre original Stepmom, et encore, ce dernier est un peu benêt.
La qualité la plus proéminente du film reste les dialogues, des lignes d'une facture insensée qui vont jusqu'à prendre la peine de donner des lignes aux enfants qui leur conviennent sous tous les angles. Un bel accélérateur de carrière pour leurs interprètes, Jena Malone et Liam Aiken (qu'on retrouvera respectivement dans Hunger Games et Les désastreuses aventures des Orphelins Baudelaire). En fait, l'œuvre entière est d'une sensibilité rare pour ce qui est du choix de ses mots et de la place de l'enfant ; ce dernier n'est que rarement réduit à son dénominateur commun de puérilité supposément charmante, et ils conservent leur dignité de petits adultes avec autant de classe que ceux d'une Madame Doubtfire (qui est une comédie pourtant).
Il y a des imperfections, notamment dans le scénario qui carbure au coup de la dernière chance (et que je t'en donne une, et que je t'en donne une autre, qu'ils sont gentils ces Américains !) et se débrouille de ses rebondissements comme d'une patate chaude, espérant que ses conflits assez convenus soient évacués par la quasi-figuration d'Ed Harris entre les géantes Susan Sarandon et Julia Roberts. On ne peut ignorer la collaboration formidable des deux actrices dont l'amitié derrière les caméras se fait tellement ressentir devant elles. Peut-être que c'est à ça que je dois mon impression qu'aucune des deux femmes ne prenait l'ascendant sur l'autre, ne serait-ce que par le poids pragmatique de leur gloire inégale ayant en commun d'être énorme.
Fans de films familiaux bien ficelés, accourez. Fans de films américains, courez. Les fans de films romantiques, on va vous faire marcher. Il n'y a plus de genres quand un film en crée un à lui tout seul par sa réussite.
Quantième Art