Ma nuit chez Maud est un voyage entre les mots et les sentiments. Un petit chemin entre les pensés de renom avec cette fixation sur Pascal, et celle plus personnelles à l'image des questionnements du personnage de Jean-Louis, incarné par Jean-Louis Trintignant. Eric Rohmer s'approprie la notion d'immersion pour l'enlever des griffes de l'attraction, au profit d'une soirée que le spectateur passe en compagnie d'êtres replaçant l'amour à sa place la plus primordiale. Un Manhattan de Woody Allen délocalisé en Auvergne, où la potentielle répétition des citations et des références se délaissent au profit de personnages misant sur le : « et toi, qu'est ce que tu en penses ? ». On retourne à hauteur d'homme, un lieu où seule l’expression des sentiments peut triompher.
Quatrième volet des Six contes moraux, cette nuit chez Maud s’intéresse à la dimension de l'amour concernant un homme pris entre sa volonté de pureté religieuse et le désir inévitable d'aimer et d'épouser la liberté. Concernant le bonhomme Rohmer, j'avais pour ma part seulement eu affaire au premier épisode de cette petit saga philosophique. Ce fût La Boulangère de Monceau et il s’avérait déjà très intéressant dans le traitement de cette question cruciale des jeunes rapports amoureux : qui dois-je préférer, la personne qui comble mon désir et ma soif d'amour présente ou celle qui m'a toujours fait rêver ? Dans Ma nuit chez Maud, Eric Rohmer s’intéresse donc à ces volontés de vie opposées qui ne peuvent finalement que se rejoindre. Le désir naturel qui sublime chaque humains face à la pureté religieuse qui magnifie autant qu'elle questionne. Rohmer construit comme une articulation entre naturalisme et l'idéalisme avec entre les deux extrême, une très belle réflexion sur le coup de foudre. Poésie personnel et complètement universelle théorisée par le pari de Pascal, et illustrée par ces regards entre Jean-Louis et Françoise au sein de l'entre de Dieu.
Eric Rohmer construit son récit au fil des mots et des heures qui tournent. Nous sommes comme en communion avec les personnages, au rythme de cet éclaircissement somptueux sur l'amour. Qu'ils sont agréables ces moments où l'ont arrive face à une oeuvre en étant remplie d'incertitudes et où l'on en ressort éblouie et conquit par un fleuve de mots agençant les sentiments. Pouvoir d'un cinéma poétique remplie d’intelligence et de bonne volonté qui sait tailler ses personnages pour les ramener à de simple Homme échangeant sur la vie telle qu'elle fredonne.