Plus posé, moins romanesque et plus nettement psychologique que d’autres films de Téchiné, Ma saison préférée dresse avec sensibilité le portrait d’une famille, celle que forment une mère et ses deux enfants et dont les autres membres, petits-enfants, beau-fils, semblent exclus tant la relation entre les trois est forte, complexe et contradictoire. Avec une discrétion et une pudeur inhabituelle chez lui jusque là, le réalisateur aborde des sujets aussi graves que la vieillesse et la mort, la maladie et l’inéluctable décrépitude physique, la difficulté des rapports familiaux et l’ambiguïté d’une relation aux limites de l’inceste entre un frère et une sœur fusionnels rattrapés par la crise de la cinquantaine. Les longues scènes entre Antoine/Auteuil et Emilie/Deneuve ou entre la mère et ses enfants, souvent filmées en gros plans, témoignent d’une direction d’acteurs très sûre au service de dialogues d’une grande justesse. Élégamment photographié dans les splendides décors de la campagne toulousaine, ce touchant manège à trois se suffirait largement à lui-même d’autant plus qu’il est magnifiquement interprété par un trio d’une grande justesse, au sein duquel Marthe Villalonga (la mère) n’est pas la moins émouvante. Quelle idée ont donc eu Téchiné et son scénariste Pascal Bonitzer d’insérer dans cette trame quasi bergmanienne des scènes totalement hors de propos, comme le strip-tease d’un jeune fille invitée le soir de Noël dont Anne (la fille d’Emilie, interprétée par Chiara Mastroianni, la fille… de Deneuve) aimerait qu’elle devienne sa sœur. Encore plus ridicule, la drague agressive et le semi-viol de Deneuve par un infirmier dans le parc de l’hôpital ou la pocharde (Ingrid Thulin) qui pousse la chansonnette dans un café avant de se faire expulser (au ralenti!) par des clients brisent totalement le rythme d’un film qui souffre par ailleurs d’une caractérisation insuffisante du personnage d’Antoine, dont on ne sait strictement rien sinon qu’il est médecin.