Ca doit faire plus d'un an maintenant que j'attends la sortie de Macbeth. Shakespeare, l'une de ses plus grandes pièces, en anglais dans le texte, ET avec Michael-Blue-Eyed-Fassbender! Comment pouvait-il en être autrement?


Seulement trop d'attente peut mener vers énormément de déception. Parce qu'il faut bien que je relève les points positifs, allons-y. Bon, les acteurs, et à mon grand soulagement Cotillard est loin d'être en reste, font l'effort de mener leurs tirades à bout de souffle, cédant à la pratique ancestrale des vers Elizabethain (ils avaient du souffle à c't'époque là, t'sais?) ; la contextualisation du Thane of Glamis, and Cawdor, dans des baraques en bois entre deux montagnes, ça me plait ; les paysages d'ailleurs, avec ces lumières magnifiques, ça oui, ça je dis oui! Les paysages, sont sûrement ceux qui ont servi de décors pour Valhalla Rising, mon numéro un dans mon top dix.


Oui mais voilà, j'ai beaucoup pensé à Valhalla Rising en regardant ce film, et beaucoup pour me dire que le film qui semble vouloir entrer dans cette lignée là, finit par se balancer entre deux eaux sans savoir dans quelle mare faire plouf. Si il y a des scènes que je trouve très bien ( l'exécution de la famille Banquo, la mort de Lady Macbeth et peut-être le combat final), il y en a surtout beaucoup qui m'ont énervées. On m'avait annoncé une bataille spectaculaire dès le début, attention à tes mirettes, tu vas mouiller la culotte, et au final je me retrouve avec des ralentis esthétisant qui alternent avec de la vitesse réelle, c'est assez à la mode, et ça m'énerve. Macbeth qui se fait mener par le bout de la trompette sans montrer de réelle résistance, de réelle ambiguïté, ça m'énerve. Si Cotillard fait tout à fait le job, elle fait ce qu'on lui demande de faire, et ce qu'on lui demande de faire, notamment dans la tirade des mains sales, lui coupe l'herbe sous le pied par rapport à l'étendue de ce qu'elle aurait pu faire en gardant la contextualisation d'origine. Est-ce que le réalisateur a trouvé ça trop théâtral? Le Château de l'Araignée est pourtant la preuve que l'hystérie passe très bien à l'écran. Mais n'est pas Kurosawa qui veut.


Et ma plus grosse déception, ça me fait mal de l'admettre, me vient du beau Michael, dont je suis la carrière depuis plusieurs années. Je suis tombée sous son charme, je l'ai trouvé bon acteur et me faisait une joie de le voir dans la peau du sombre Macbeth. Pourtant j'ai trouvé qu'il en faisait trop. Beaucoup trop. Sombre, il l'est dès le début. Son honnêteté qui pourtant est censé être suffisamment palpable au début pour que le spectateur puisse le sentir basculer, je ne l'ai jamais sentie. La folie est tout à fait surjouée. Les insomnies doivent-elles forcément impliquer des mouvements d'avant en arrière? Les grimaces, les scènes démonstratives type "vous avez bien vu, hein, que je suis fou?", nécessaires aussi? Quant au jeu même de Fassbender, je l'ai senti nettement moins charismatique que Cotillard (à ma grande surprise), et surtout, j'ai eu l'impression de revoir la même chose à un poil de derrière près que ce que j'ai vu de lui dans ses derniers films (12 Years a Slave surtout), et je me suis demandée si il allait faire les gros yeux tristes ou et fou toute sa carrière ou se décider à mettre un peu plus de nuances globalement.


Pour moi, Macbeth, malgré son sujet macabre, c'est très vivant, ça bouillonne, ça s'emballe, c'est un tourbillon inextricable qui précipite ses acteurs principaux au fin fond de l'enfer. Là, en guise de tourbillon, j'ai un marasme, un brouillard lourd et stable, présent dès le début, et sans mouvement aucun. Je n'ai pas vu de fuite en avant, je n'ai pas trouvé de rythme. Au lieu de ça, un texte magnifique, un potentiel incroyable, et une décision de faire du beau plutôt que du grand.

EIA
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le 20 nov. 2015

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