Je ne comprends pas qu'on reproche à Maggie de taper dans le mainstream (ce que j'ai lu ci et là) alors qu'à mes yeux, c'est tout le contraire. S'accaparer un genre comme le film de zombies, monument de la pop culture prenant davantage de place dans la geekosphere au fil des années – et ayant gagné encore plus en popularité récemment grâce à The Walking Dead (Hey Maggie !) –, est un pari risqué : il faut pouvoir innover, éviter de sombrer dans le déjà-vu mortifère et le topos réchauffé.
Dire que le film de zombies n'est qu'un divertissement avilissant (ce qu'il est parfois, j'en conviens), c'est réduire sa portée polémique et omettre qu'il demeure, surtout aujourd'hui, un miroir de nos plus grandes craintes, reflet funeste de nos sociétés en proie à une apocalypse progressive. Maggie relève le défi haut la main, celui de dévier des sentiers maintes fois battus, ayant tendance à emprunter la voie de survivals nerveux, pour livrer une œuvre minimaliste.
Maggie fonctionne précisément parce qu'il se cantonne à une poignée de personnages – la présence de Schwarzenegger à l'écran n'est pas en rien dans la réputation du métrage, forcément, s'il a un rôle à contre-emploi, le film ne peut être qu'une grosse blague (?) –, en l'occurrence, une famille dont les liens se délitent à mesure que la fille est rongée par un virus qui l'animalise. L'action prend majoritairement place dans une ferme isolée en pleine campagne, loin d'un tumulte urbain dont ne nous parviennent que de vagues échos. Pas de hordes de morts-vivants affamés à l'horizon, donc, mais quelques voisins dont l'humanité s'est putréfiée, errant malhabilement sur une étendue désertique et désertée.
De ce fait, la restriction des unités de lieux et de temps permettent au film d'accéder à une dimension plus intimiste, une apocalypse à notre hauteur. S'il a des allures de drame familial, le film ne tire jamais vers le mélodrame excessif, minimisant plutôt ses effets au travers de scènes quasi-muettes, se concentrant sur un quotidien ayant perdu ses couleurs, bénéficiant d'une photographie froide et ternie, comme si l'on essayait de se restituer les vestiges d'une existence dépassée, sur le point de définitivement s'écrouler.
Maggie observe l'apocalypse comme si elle n'eut été rien d'autre qu'une mort lente et désespérée, vécue presque en temps réel, privilégiant des émotions modestes, un rythme lancinant et un réalisme crépusculaire à une course effrénée pour la survie. Pour une fois, les personnages n'en réchappent pas, bien conscients qu'ils sont voués à disparaître à leur tour, fatalement résiliés, attendant que la mort ne frappe à leur porte sans chercher à s'en barricader : seuls primeront les derniers instants de l'existence avant que le chaos ne vienne y mettre un point final. Une dernière fête entre amis, un dernier baiser, un dernier au-revoir, puis la chute.