Superman est le super-héros avec lequel j'ai grandi. Les films avec Christopher Reeve (et Brandon Routh en 2006), les séries Lois&Clark et Smallville, et les dessins animés qui passaient à la télé, j'ai passé mon enfance et mon adolescence plongé dans les valeurs inculquées à Clark Kent et ses actions héroïques. Étrangement, c'est Smallville qui m'a le plus influencé (paradoxal notamment car Superman en lui-même y apparaît très peu), avant même les films de Christopher Reeve.

Avec ce « background », c'est peu dire que j'attendais Man of Steel avec impatience.

Pourtant, l'aspect que je connaissais le moins de Superman avant de voir ce film était étonnamment celui des comics. Comme j'aime me documenter un peu avant de me plonger dans une œuvre, j'ai lu quelques-uns des plus influents ouvrages sur l'Homme d'Acier. J'ai donc pu découvrir pas mal d'histoires diverses et variées, et beaucoup de versions différentes du super-héros. Autant dire qu'il y a des tas de possibilités pour faire de bons films !

Malgré cette récente documentation, en allant voir Man of Steel, j'étais forcément dans une optique très cinématographique de Superman, influencée par les films de Reeve et par Smallville. Et beaucoup d'aspects m'ont donc surpris dans ce film.

Du point de vue du scénario, on pourrait dire qu'on a ici affaire à un mix entre Superman 1 et 2 (sortis respectivement en 1978 et 1980), puisqu'on assiste non seulement aux débuts du super-héros, à son apprentissage de ses incroyables capacités, mais aussi à l'affrontement qu'il va mener contre son propre peuple, principalement par le biais du général Zod. Du point de vue scénaristique, beaucoup de choses renvoient d'une manière ou d'une autre à ces deux films, mais aussi aux comics. Je dois dire que je n'ai pas encore lu les principaux comics dont s'inspire Man of Steel, et n'ai donc pas de références à ce niveau-là. Dans tous les cas, c'est une approche comics qui a été abordée avec ce film, et ça se voit.

Il y a dans ce film un manque global de poésie, pour ma part. Alors que la saga Reeve m'avait habitué à de jolies scènes, pleines de bravoure, de naïveté ou de douceur selon les moments, on retrouve plutôt ici la puissance et le côté tragique du super-héros, bien que toute la grâce ne soit pas éradiquée (le discours de Jor-El lorsque Clark apprend à voler, ou bien le flashback lorsque Clark enfant joue avec son chien, une cape rouge accrochée dans le dos).

Toute la partie sur Krypton, portée notamment par Russel Crowe, qui campe un parfait Jor-El, change radicalement de la version « cristalline » des films de Reeve ou de la série Smallville (qui reprend pas mal d'aspects des films de Reeve). En tout cas, contrairement au film de 1978, Krypton est ici de toute beauté et on se plairait même à voir un film entier se déroulant avant sa destruction. Une vingtaine de minutes est consacrée à l'action sur cette planète, et lorsqu'arrive le moment fatidique, on a quand même bien les boules !

Mais la mort du peuple signe la naissance du dernier fils : Kal-El, de son nom kryptonien, arrive sur Terre. Et c'est là que vient une autre surprise pour ma part. Alors que je me serais attendu à une construction tout à fait classique du film, le montage alterne en réalité de manière assez abrupte entre l'enfance/adolescence de Clark et lorsqu'il est adulte, dans le présent, en quête de réponses à ses questions. Ainsi, on passe relativement souvent d'une action dans le présent à une morale apprise dans le passé de Clark. Et bien que ces phases alternées puissent surprendre, les passages où l'on voit une partie de l'enfance de Clark ne sont en réalité pas placées au hasard. Elles servent à nous montrer un aspect de Superman qui jusqu'ici, je trouve, avait été assez peu traité au cinéma : son humanité.

Lorsque je parle de son humanité, il s'agit à la fois des valeurs que lui ont enseignés ses parents adoptifs mais aussi de ses instincts et ses défauts. Lorsque tout jeune, Clark est confronté à des problèmes, il les envisage d'une manière différente des autres, car il a des possibilités supérieures, mais pourtant, il a aussi une morale, enseignée par ses parents. Les passages de la jeunesse de Clark sont donc là pour nous montrer qu'il a déjà traversé certaines épreuves, refréné certaines pulsions, résolu certains questionnements, et s'il agit (ou n'agit pas, justement) comme il le fait dans le présent, c'est pour de bonnes raisons. Pourtant, même s'il a appris à devenir humain, Clark n'est pas parfait. Être humain, c'est aussi avoir des défauts.

Et des défauts, ce Superman en a, pour une fois. Car s'il est tout-puissant, s'il est amené à devenir un jour « un idéal à atteindre » pour les Hommes, ça ne se fera pas avec facilité. Une fois le costume endossé, il doit faire face à plusieurs problèmes. Celui qui m'aurait paru le plus important est finalement relégué au tout dernier plan dans ce film. La double identité du super-héros a une place différente dans ce film, et elle n'est pas traitée de la manière classique ici. Lorsque Zod débarque sur Terre, Clark doit faire face à ses responsabilités et mettre de côté son ego terrien. Il sait qu'à peine son nouveau rôle endossé, il va peut-être devoir se sacrifier à la tâche.

La première partie du film nous plonge donc finalement dans l'aspect humain de Clark, au travers de ses questionnements sur sa nature et ses origines, avant qu'il ne devienne Superman. Pas de vraie poésie pour moi, pas le côté lyrique qu'on pouvait trouver dans les premiers films, mais un côté mythologique (il y a d'ailleurs une symbolique très forte sur Dieu), qui s'inspire des comics et aussi de Smallville (oui j'en parle souvent, quand il s'agit de Superman!), et qui nous rapproche du côté humain de ce super-héros.

La seconde partie du film voit la menace arriver en la personne de Zod et son armée de kryptoniens, et c'est là que commence tout le côté épique et jouissif du film. Même si un certain nombre de scènes sont parmi mes préférées dans la première partie du film, il faut bien avouer qu'on prend un pied immense du milieu jusqu'à la fin. On pourrait même en arriver à saturation, mais de mon point de vue, Superman avait vraiment besoin d'être revigoré au cinéma, car jusqu'ici, on n'avait jamais vraiment vu le côté puissant, colossal et titanesque de ses pouvoirs. Jamais il n'avait eu d'adversaire à sa taille dans les films, ou alors s'il l'avait eu en 1987, le film manquait malheureusement d'argent et d'audace (mais surtout d'argent !). Idem en 2006, sauf que là c'était l'audace qui manquait, car il y avait les moyens ! Bref, Man of Steel ne manque pas d'action, c'est sûr, et je le répète : QUEL PIED ! Je retiendrais tout particulièrement le combat entre Superman et Zod dans Metropolis, qui signe vraiment l'apogée de la rencontre, également grâce à la musique.

Hans Zimmer, clairement mon compositeur favori, signe là une immense réussite musicale. Avec Superman, pourtant, il y avait de quoi avoir un peu peur : Zimmer allait succéder à John Williams, dont la mélodie de Superman était restée sur les écrans jusqu'en 2006, et même jusqu'en 2011 avec Smallville, qui faisait apparaître le thème dans un épisode clé. La fameuse symphonie était donc restée associée au super-héros depuis plus de trente ans, et nul doute qu'elle y restera accrochée encore très longtemps. Cependant donc, Hans Zimmer allait devoir créer une nouvelle composition, sans la fameuse mélodie, pour continuer dans l'esprit de démarcation de ce nouveau Superman avec les anciens. Sans trop détailler, Zimmer a réussi là où, selon moi, Williams avait relativement échoué (ou était resté discret, du moins) : mettre en musique le côté humain de Superman. Il y a une mélodie jouée au piano qui reflète très exactement cet aspect là, qui revient souvent dans le film, et la séparation entre l'humain et le super-héros est ici bien définie. Si on avait auparavant eu droit au côté patriotique et symbolique du super-héros tout-puissant, on a ici droit non seulement à cela mais aussi à une humanité profonde, fragile et touchante.

Au niveau du casting, pas de déception non plus, malgré une remarque.
Déjà, il ne fait aucun doute qu'Henry Cavill est parfait pour le rôle. Il sait englober à la fois le côté humain de Clark et l'aspect imposant et symbolique de Superman. Il est de mon point de vue le digne successeur de Christopher Reeve, et on pourrait même voir un passage de flambeau entre les deux acteurs dans une scène en particulier, où Clark doit lutter contre une machine à gravité pour décoller du sol, car la ressemblance entre Cavill et Reeve est à ce moment-là frappante !
Russel Crowe est également excellent dans son rôle, il n'y a rien à dire, et s'il en impose sur Krypton, il ne vole pas la vedette à Ayelet Zurer, que j'ai trouvé parfaite en mère effondrée par le sacrifice qu'elle doit faire.
Le couple Kent formé par Kevin Costner et Diane Lane brille aussi, d'autant qu'ils ont vraiment droit à de magnifiques scènes. Nul doute que dans la mythologie Superman, les parents adoptifs de Clark sont ceux qui me donnent toujours le plus d'émotions.
Du côté des méchants, j'ai trouvé Michael Shannon très juste dans le rôle de Zod. Son petit monologue sur son peuple avant l'apogée du combat est particulièrement retentissant.
Malgré ça, il y a un autre rôle qui m'a surpris : celui de Faora, incarnée par Antje Traue, qui donne un côté à la fois envoûtant, mystérieux et menaçant à son personnage. De plus, le personnage a droit à un petit développement très intéressant.
Je passe les personnages secondaires, un peu trop nombreux pour être listés, mais les acteurs remplissent bien leurs rôles et ont tous droit à leurs beaux moments, que ce soit du côté Daily Planet ou chez les militaires.

Ma seule remarque, finalement, concerne le personnage de Lois Lane, interprété par Amy Adams. On a pu voir l'actrice dans un épisode de Smallville il y a longtemps (ce n'est pas la seule dans ce film). Elle joue plutôt bien le rôle, mais le problème vient plutôt du développement du personnage. Autant la première partie est assez bien maîtrisée, et d'une manière originale, autant la seconde moitié redevient un traitement bête du personnage : la femme en détresse. Dommage, ça partait bien, et si ça n'enlève pas ce qui a été fait en première partie, on sent quand même en seconde partie que le personnage est là juste parce que c'est un personnage « obligatoire » dans l'univers Superman.

Bon vous l'aurez compris, même s'il n'est pas parfait, ce film est un monument pour moi, j'en parlerais très longtemps si j'en avais l'occasion.

CONCLUSION (qui conclut lentement !)

Man of Steel n'est pas le film que j'attendais à proprement parler. En réalité, je ne savais pas vraiment ce que j'espérais en entrant dans la salle de cinéma pour la première fois. Mon cœur battait juste la chamade à l'idée de savoir que j'allais retrouver mon super-héros favori dans une nouvelle version.
Ce film m'a énormément surpris car je ne m'attendais pas à une approche aussi « comics ». Peut-être à cause de la trilogie Dark Knight et de la présence de Nolan à la production (et non à la réalisation !), mais au final, ce fut une agréable surprise. La puissance de Superman est enfin mise en valeur dans ce film, et il y en avait bien besoin depuis Superman Returns en 2006. On retrouve tout de même aussi les codes classiques de Superman, modernisés, et la réussite de ce film, c'est d'avoir su donner une vision nouvelle au grand public, une vision moins naïve que dans les précédents films, et plus axée sur les comics : moins de réalisme, plus de spectacle, et pourtant une crédibilité immense.

(SPOILER – à lire seulement si vous avez vu le film)
Beaucoup crient au scandale qu'autant de gens soient sacrifiés durant la bataille de Superman contre ses ennemis, et surtout de l'issue du combat contre Zod, qui est clairement choquante, mais c'est justement là l'audace du film de montrer un tel défaut chez ce super-héros tout juste né. Il ne peut pas sauver tout le monde dans son combat, comme dans le film de 2006 par exemple, où il entend et voit tout. Et de même, il doit à la fin faire un choix : laisser mourir des humains (ce qui reviendrait presque à les tuer lui-même) ou arrêter le massacre tant qu'il le peut encore. Tuer Zod, c'est tuer le dernier kryptonien autre que lui, son dernier « frère », mais c'est aussi sauver des millions de vies humaines et innocentes.
(FIN DU SPOILER)

Faut-il rappeler que nous avons ici affaire à un « Superman Begins », et que le héros doit encore apprendre beaucoup avant d'être super ? Le costume et les pouvoirs ne suffisent pas, il y a de nombreuses épreuves à traverser, et des choix à faire. J'admire énormément la fin de ce film, car elle représente exactement ce que je disais plus haut : l'aspect avant tout humain (dans ses défauts) de Superman, ainsi que sa crédibilité dans le monde.

Personnellement (et je sais que je ne suis pas vraiment objectif à propos de ce film), la vision donnée dans ce film m'a beaucoup surpris, certes, et même choqué la première fois... ce qui ne m'a pas empêché d'aller voir le film quatre fois au cinéma ! C'était un régal à chaque nouveau visionnage, ce film m'a fait vibrer et le fera encore les prochaines fois. Voilà pour moi le véritable nouveau Superman au cinéma, comme Christopher Reeve le fut en son temps, même s'il restera quand même LE vrai Superman dans l'histoire.

Man of Steel est une réussite visuelle et sonore, maîtrisée par le réalisateur et les acteurs. Le film remplit son contrat et nous donne enfin de la puissance à l'état brut ainsi qu'un nouveau souffle sur ce super-héros, sans oublier quand même les codes et la tragédie qui englobent son histoire. Nul doute pour moi qu'il s'agit avec le film de 1978 de la meilleure adaptation de Superman sur grand écran, et on est partis sur des bases assez solides pour faire une trilogie épique ! (si c'est une trilogie...)

J'attends de pied ferme le prochain film, qui pour la première fois au cinéma, réunira les deux plus grands super-héros de tous les temps : Superman et Batman. Je ne sais pas ce que vaudra le film, mais ô combien je l'attends, celui-là !

Créée

le 3 déc. 2013

Critique lue 404 fois

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Yoyo la Frite

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