Merci à Cloe et Caroline qui ont rédigé cette critique avec moi ;)

Le nouveau film de Ryan Murphy, Mange, Prie, Aime, sortit en France en septembre 2010, met en scène Julia Roberts (Elizabeth Gilbert), Richard Jenkins ainsi que Javier Bardem. Tiré du roman éponyme d'Elizabeth Gilbert, ce film nous retrace l'histoire d'une femme New-Yorkaise divorcée qui cherche à se reconstruire en parcourant le monde. Pour ce faire, elle entamera son voyage par l'Italie pour retrouver le goût des bonnes choses, puis fera escale en Inde pour renouer avec Dieu, et terminera son voyage à Bali où elle finira par rencontrer l'âme sœur. Un film marqué par trois parties aux rythmes, tons, sonorités et ambiances différentes, chacune marquant une étape dans sa quête du renouveau. De ce film nous retiendrons quelques faits marquants, notamment la présence à peine dissimulée d'une vision ethnocentrique d'un monde occidentalisé. Frappé par une armée de cliché, le public se voit assailli par une vision faussée du monde. De ces clichés on citera l'Italie et sa vie mouvementée, sa nourriture qui se résume aux « pastas » et aux pizzas. Concernant l'Inde on retiendra l'intrusion de la musique de Mia, déjà utilisé dans le film Slumdog Millionnaire de Danny Boyle. On y voit l'Inde du point de vue occidentale ce qui se résume à des tas d'immondices accompagnés de vaches osseuses, de mariages forcés et de ashram luxueux. A Bali, on retrouvera la figure emblématique du sage édenté, sans parler de la rencontre entre Felipe (Javier Bardem) et Liz qui se trouve être le plus vieux et ridicule début d'histoire d'amour vu au cinéma. On remarquera aussi une absence totale de réflexion affligeante, or c'est ce que l'on s'attend à trouver dans ce film, notamment à cause de la bande annonce qui laisse présager un film d'introspection. Au final elle nous montre l'essentiel des moments à voir, dans le désordre le plus complet, sans compter la disparition mystérieuse de certaines scènes au montage final. On retrouve ici le concept de publicité mensongère. Là où on s'attend à trouver un film différent, on retrouve un film typiquement Hollywoodien d'où l'on ressort déçu.

Finalement nous n'apprenons que peu de chose, pour ne pas dire, rien sur les civilisations que Liz rencontrent au cours de son voyage. Commençons par l'Italie dépeinte comme un royaume héritier d'une puissance perdue qu'était l'empire Romain. L'héroïne se promène avec plaisir dans les rues pavées de Rome, se ballade au milieu des ruines d'un immense mausolée Romain et c'est à peine si on entrevoit l'église, que l'on devine majestueuse, dans laquelle elle s'en va prier. C'est tout naturellement que les Italiens nous sont présentés comme des personnes pressés, au bord de l'implosion, comme si ils ne savaient rien faire de mieux que crier après les automobilistes, ou les joueurs de football. Sans compter le fait qu'ils ne parlent qu'avec les mains et privilégient la détente au travail. Qui peut sincèrement croire que l'Italie se résume à cette image stéréotypée que nous renvoie Liz à travers sa visite ? Néanmoins on ne peut nier le bonheur que doit apporter la nourriture à Liz et de ce côté les spectateurs en prendront plein la vue, peut-être même trop parfois quand on remarque la longueur de certaines scènes centré sur les plats qu'elle déguste. L'Italie de Murphy prépare peut-être aux souffrances qui découlent de la suite des évènements. En ce sens on peut penser que cette partie du film se veut légère et amusante afin de préparer le public à des scènes moins volage ensuite. Au final on en retient bien peu de choses, nos yeux étant sans cesse accaparer par des clichés ridicules qui efface la situation et les sentiments profonds de Liz, qui, rappelons le, est en Italie pour trouver des réponses. La seule que l'on puisse trouver, et qu'elle a bel et bien trouvé, c'est d'échapper aux ennuis et à nos problèmes en faisant la fête, tout simplement.

De son escale en Inde on ne retiendra qu'une armée de clichés véhiculant l’idée de pauvreté, omniprésente, tel que nous le montre les tas d’immondices accompagnés d'enfants courant après son taxi en espérant obtenir quelques pièces. Ces clichés permettent de renforcer l’idée que l’Inde est un pays en retard sur l’occident et occulte toute idée de progrès ou de possibles changements à l'heure actuelle. Malgré tout, à l’arrivée de Liz au ashram, tout devient beau et sain. On en oublierait presque ce passage dans la basse société indienne ! Si ce lieu est dédié à la prière et à la méditation, valeur éminemment orientale, tout y est occidentalisée : de la salle de méditation climatisée et ouverte 24 heures sur 24 aux services conçut comme ceux d’un hôtel. On y voit une sorte de consommation de la spiritualité : tout y est prévu pour le bien être et l’investissement de soi mais on ne peut s’empêcher de penser à une chaîne de prière standardiser puisqu’on a pu observer la même chose à New York lorsque Liz découvre cette Gourou et son enseignement. Cette idée est renforcée par le fait que cette gourou est dans son ashram de New York, finalement elle gère ses lieux de cultes comme un PDG de multinationale : depuis la « Big Apple ». Si besoin est, la ressemblance avec un hôtel nous sera encore confirmer lorsqu’on demandera à Liz d’accueillir les nouveaux arrivants en étant une « Suzie crémeuse », telle une hôtesse de club de vacances. Le seul fait qui montre que l’Inde ne subit pas une acculturation totale, est la présence d’un Coca Cola très sucré, et donc différent de celui que nous connaissons, qui nous rappel que ce pays est différent de notre monde puisque même la multinationale la plus célèbre du monde à dû s’adapter un minimum aux coutumes de l'Inde. Une petite piqure de rappel nous est ensuite faite avec l’insertion d’un mariage forcé, mais encore une fois on y ressent une vision unilatérale : seul le point de vue de l’occidentale divorcé y est abordé. Le point de vue du futur époux, que l’on voit comme un bourreau malgré toutes ses qualités, n’est même pas mentionné ! Sans compter celui des parents qui se trouve être inexistant. Révoltant, en tant qu'occident on trouvera cet évènement contre nature, même si le futur époux à l’air accommodant. Après cet épisode il n’y a plus rien de notable sinon la guérison spirituelle de Liz qui se décide enfin à partir à Bali pour la poursuite de son voyage.

Alors que Bali est un endroit splendide, on s'attendait forcément à des scènes grandioses montrant toute la beauté de cette région. Mais non, cette partie commence comme le début du film, avec des images plutôt belles, mais pas magnifiques, de paysages qui entourent Liz. Son escale à Bali comporte trois éléments principaux : la recherche de soi, l'amour et la paix retrouvée. Liz rencontre à nouveau le sage qu'elle avait déjà consulté au début du film. Il lui propose de l'aider si, en retour, elle recopie des mantras et des vieux remèdes. Même à Bali, on retrouve cette affreuse logique de consommation. Et, encore et toujours de gros stéréotypes : rien que lorsqu'on voit Ketut, le sage, il est exactement comme on se l'imaginait : calme, vieux, édenté, un brin de folie dans le regard. Ce n'est pas le seul, on en retrouve rapidement dans son histoire d'amour, dès le début, avec une rencontre des plus banales que l'on peut voir au cinéma. Liz, qui se promenait en vélo, se fait reverser par Felipe (Javier Bardem). Évidemment on ne peut que trouver ridicule le fait qu'ils se revoient le soir même en nous faisant croire qu'aucune histoire ne découlera de leur rencontre. Puis naturellement, nous avons le droit à la bonne vielle fausse rupture à laquelle personne ne croit vraiment. Cette partie est tellement remplie de stéréotype qu'on a du mal à voir le reste du film et à comprendre le sens profond des choses. Bien sur, ce n'est pas la seule rencontre qu'elle va faire durant ses quatre mois à Bali. Elle rencontrera une Brésilienne qui lui fera connaître les joies de s'amuser, mais aussi une famille composer d'une femme divorcée et de sa petite fille d'une dizaine d'années. On se rend compte que tout le monde parle anglais, et qu'elle se fait des amis très facilement ce qui retire tout son réalisme au film. Cette dernière rencontre va enfin l'aider à se retrouver elle-même puisque Liz ne va pas se regarder le nombril, pour une fois, mais aider cette nouvelle amie et sa fille : « Parfois quand on veut s'en sortir, on finit par aider le monde. ». Cette partie est la plus niaise de tout le film, elle reprends tous les stéréotypes d'un film d'amour lambda. Elle est aussi beaucoup trop longue, et beaucoup de moments inutiles auraient pu être évitées. Malgré tout c'est la partie qui conclue le film et qui permet à Elizabeth de se retrouver, d'être en paix et, bien sur, d'être à nouveau heureuse et accomplie.

Amateur de film d'amour, ou tout simplement de Julia Roberts, ce film vous fera passer un agréablement moment. Ceux qui s'attendent à trouver là un grand film d'introspection et de réflexion en ressortiront déçus, voire dépités. Vous ne trouverez guère aucune réponse si ce n'est qu'il faut profiter de la vie sans oublier de penser aux autres. Car seul on ne va jamais bien loin. Elizabeth Gilbert aura mis un an pour s'en rendre compte...
Rivendell
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le 24 mars 2014

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