Chauve qui peut, Elijah Wood est un Maniac !

C’est pleine de crainte mais aussi de curiosité que Céline Online s’est rendue à l’avant-première du remake de Maniac, réalisé par Franck Khalfoun, au cinéma Max Linder. Petit bonus, la projection a été suivie d’une rencontre avec Alexandre Aja, Nora Arnezeder et Rob, le compositeur de la musique du film.

Il y a des films qui devraient être classés au patrimoine mondial de la cinématographie. Des films cultes auxquels il devrait être interdit de toucher. Les exemples sont malheureusement trop nombreux et comptent parmi eux les prochains Evil dead - Ash je t’aime – ou encore Maniac. Des films de légende que rien ne pourra jamais remplacer.

Mais dis-moi Céline Online, pourquoi es-tu aussi réticente face aux remakes ?
L’original de Maniac résonne comme un doux souvenir de ma tendre enfance. Je me rappelle avoir bavé de très longues semaines devant l’affiche du film. Elle trônait au fond du vidéo club de mon quartier, dans le coin « films défendus » (comprendre films d’horreur et non, pornographiques). C’était dans les 90’s et j’avais dans les douze ans. Plus qu’une affiche, c’est surtout un film interdit posé sur une étagère entre Braindead et La dernière maison sur la gauche. Je l’ai désiré ce film de William Lustig. Pour arriver à mon but, j’ai dû la jouer fine et faire ami-ami avec le propriétaire du vidéo club (Jean si tu me lis : big up !). Une fois le précieux récupéré il faut pouvoir le visionner chez soi en toute discrétion. Personne ne doit connaitre mon petit secret : je regarde des films d’horreur ! Bref, Maniac est un peu la madeleine de Proust de Céline Online et donc la principale raison de sa réticence face à ce remake.

Bon alors qu’est-ce qu’il a de nouveau le Maniac de Franck Khalfoun ?
Qui dit remake dit malheureusement comparaison. Concrètement, le pitch est le même. Un homme taré, fanatique des mannequins, qui satisfait son complexe d’Œdipe en scalpant des cheveux de femmes. Maniac traite de la peur d’être seul, rejeté et de ne pas être aimé. Le scénario est quant à lui remis au goût du jour avec internet et téléphones portables.
Maniac à sa sortie en 1980 marqua l’opinion publique. C’est une première, le film a pour héros le tueur lui-même. On ne suit pas une héroïne à la Girl Power. Non, on s’intéresse à celui qui va scalper tout ce qui bouge. Une façon de forcer le spectateur à s’identifier au tueur, voir à s’attacher et à avoir de la sympathie pour lui. C’est principalement cet aspect qui va être repris dans le remake de Maniac grâce à la vision subjective. On peut voir dans ce procédé une sorte de clin d’œil interminable à la scène d’ouverture de la version de William Lustig. Malheureusement, se taper 1h20 de film à la première personne du singulier est très vite lassant. On sent une mise en scène forcée et non naturelle. Il n’y a jamais eu autant de reflets que dans ce film (et pourtant, Alexandra Aja a réalisé Mirrors …). Du coup l’effet « je suis dans l’esprit du tueur, mieux, je suis le tueur » tombe rapidement à l’eau. Quoi que, je suis certaine que beaucoup de personnes seront dérangées et mal à l’aise. Filmer en vision subjective c’est aussi se voir priver du talent d’Elijah Wood. Malgré son manque d’existence à l’image, l’acteur arrive à nous imposer sa présence par sa voix au combien inquiétante. (Céline Online n’ose même pas imaginer une version doublée en français pour ce film.)

Avec sa tête de gentil on donnerait le bon Dieu sans confession à Elijah Wood, qui incarne une personne d’apparence timide et sans défense, ce qui le rend d’autant plus sadique. Voilà une véritable innovation par rapport au premier Maniac. Dans l’original, William Lustig avait choisi Joe Spinell dans le rôle de Franck : une brute grande, carrée et pas franchement séduisante. Autant dire qu’il n’y a aucune ressemblance entre les deux acteurs.

Autre personnage intéressant de Maniac : la ville de Los-Angeles. Elle est magnifiquement filmée et sublimée. Pourtant, éternelle insatisfaite que je suis, ce n’est pas ce que j’aurais voulu voir. Des films comme Taxi Driver ou Drive qui ont eux aussi la ville pour personnage central, vous laisse rêveur. Mais avec Maniac, nous sommes dans un film de tordu. Une esthétique un peu plus crado aurait probablement mieux fait l’affaire. Alexandre Aja nous expliqua lors de la Master-Class après la projection en avant-première de Maniac le pourquoi du déménagement de l’intrigue de New-York à L.A : « Le centre-ville de Los-Angeles est un endroit un peu déserté dans lequel on ne va que très rarement, si ce n’est jamais, même quand on est à Los-Angeles et que l’on vit là-bas. D’habitude on utilise L.A pour faire croire à un New-York vite fait. Il y a tout une partie downtown L.A qui est un peu la cours des miracles de Los-Angeles, et quand je dis la cours des miracles je pèse mes mots parce que c’est exactement ça. Une zone qui se métamorphose quand la nuit tombe. Les monstres sortent de terre, c’est assez flippant. Dans l’original, New-York est un personnage à part entière. Ça sent la pisse. Ce New-York-là a disparu depuis pas mal de temps maintenant. C’est maintenant très aseptisé, très Disneyland et donc plus du tout le New-York du Maniac de 1980. Downtown L.A aujourd’hui est exactement ce New-York-là. Un New-York où les gens viennent travailler la journée et est abandonné à la nuit tombée. C’est dangereux. Il y a une sorte de faune très étrange. C’est une partie de Los-Angeles qui est rarement utilisée pour ce qu’elle est. C’était donc une évidence. »

Si les effets spéciaux sont d’un réalisme saisissant (le numérique vient compléter le make-up sans jamais être trop présent et gâcher la scène), on ne peut pas dire la même chose du scénario. Il y a de nombreuses aberrations dans l’écriture du film… ou alors on a voulu faire du personnage de Franck quelqu’un d’assez neuneu. Se rendre dans un hôtel particulier pour y tuer quelqu’un sans se dire : « hoo non il y des caméras », est quand même assez con. Je veux bien croire que le personnage souffre de pulsions, m’enfin, un minimum de crédibilité s’il-vous-plait Messieurs les scénaristes !
Les filles elles ; des bonasses of course, sont toutes aussi connes les unes que les autres. Mise en situation : il est tard et je me sens suivie dans le métro. Réaction sans instinct de survie : je préfère sortir de mon wagon, alors qu’il y a du monde à l’intérieur, pour descendre à une station déserte (et sans caméra de surveillance). Je comprends que je suis effectivement suivie, je vais donc aller me réfugier à l’extérieur dans le lieu le plus sûr au monde : un parking non éclairé au bout d’une allée bien sombre. Et évidemment, je n’utilise pas mon téléphone portable, ça ne sert à rien. Bref, complètement cliché d’une série B !

Il y a quand même un point indéniablement positif sur ce remake de Maniac : la bande originale composée par Rob. La musique est très électronique mais mélodique. Bizarrement, Rob apporte une touche de romantisme au long-métrage. Comme si le film dégageait un certaine de beauté dans cet univers dégueulasse. Cette bande-originale nous aide à ressentir une certaine empathie pour le personnage de Franck.
–> Pour écouter le travail de Rob alias Robin Coudert <–

Bon en gros pour le classique on repassera et on classera le remake de Maniac dans la catégorie « divertissement ». Le film d’1h20 se laisse regarder mais s’oublie tout aussi rapidement. Certes, cette nouvelle version apporte des réponses par rapport à l’original mais à quoi bon ? Ne serait-ce pas une excuse pour plutôt justifier la réalisation du remake d’un film qui n’en a pas besoin ? Maniac est donc à voir sans connaitre l’original pour être apprécié. Les fans de la première heure repasserons.
Celine_Online
4
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le 6 janv. 2013

Critique lue 345 fois

Céline Online

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