Mank a gagné?
Le mérite du film, c'est de nous dire que Citizen Kane (1941) a été écrit en majeure partie par Herman Mankiewicz et non pas par Orson Welles. Ils reçurent ensemble l'Oscar du meilleur scénario...
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Confiné au lit suite à un accident de la route, en pleine Californie des années 40, le script Herman Mankiewicz (Gary Oldman) n'a que quelques semaines pour rédiger le scénario de ce qui deviendra l'un des films les plus acclamés de tous les temps, Citizen Kane, pour le jeune Orson Welles (Tom Burke). Cette collaboration compliquée rassemble deux personnalités en marge de la société hollywoodienne : un artiste précoce, dépourvu d'anxiété, et un script doctor et scénariste de rigueur et souvent négligé. Le film évoque le débat autour de la production dudit film, la relation de l'artiste avec Marion Davies (Amanda Seyfried) et le magnat de la presse William Randolph Hearst (Charles Dance)
constituée de trahisons et d'émancipations
ainsi que les différents démons qui le rongent.
Il y a ceux qui partent de rien pour en tirer des monts et merveilles, d'autres qui se gourent complètement sur un sujet intéressant sur le papier, mais qui s'avèrent interchangeables et peu attrayants sur pellicule. Mank, nouveau bébé de David Fincher et diffusé sur Netflix rejoint, à mon plus grand regret, cette seconde catégorie.
Citizen Kane est un film qui fait partie du patrimoine, indispensable et époustouflant sur de nombreux aspects même si je n'en suis pas plus admiratif que cela ; regarder deux heures d'insert historique sur son écriture ne s'est pas avéré des plus exaltants et j'en suis ressorti aussi neutre que s'il avait été un documentaire sur les plantations de pommes de terre en fin fond de Géorgie.
Le secteur de la scénarisation est tout particulièrement passionnant, et paradoxalement c'est ce qui manque grandement à Mank. Le glossaire cinématographique est maîtrisé, clair dans l'ensemble pour qui s'est déjà penché sur le sujet, mais ne satisfait guère ; c'est un film qui se concentre plus sur les relations de Mankiewicz que sur son travail en tant que tel, d'où la surprise de certains spectateurs guère friands de ce vocabulaire. Mank, ce sont de belles images de tranches de vie d'un artiste, montré à l'état brut dans un sublime noir et blanc, et des voix résonnant même en extérieur, avec deux séquences qui se détachent des autres:
La scène où Mankiewicz présente son travail en mains propres, un pavé de 200 pages inespérées, durant laquelle nous ressentons un certain soulagement ; et, entre certains échanges mémorablement mis en scène, le final, présenté de façon aussi distordu soit-il, se concluant par la réception de l'Oscar avec le président de la RKO George Schaefer représentant le binôme.
Sinon, qu'est-ce que c'est quelconque et bancal en soi. C'est remarquable pour l'esthétique, certaines images qui s'affranchissent du rythme plan-plan accoutumé, et pour son intrigue puisque c'est un récit sine qua non, mais prenons un autre cas d'écriture filmique le résultat sera quasiment le même, à quelques différences près, et ne témoignant en rien du style habituel de Fincher.
La BO de Trent Reznor et d'Atticus Ross, compositeurs fétiche de Fincher depuis The Social Network (2010), trop lisse et ayant délaissé toute la modernité derrière les deux membres actifs emblématiques de Nine Inch Nails, n'en demeure pas moins tout à fait appréciable et calibrée pour ce témoignage filmique.
Mank est un nouveau Fincher en demi-teinte, ambitieux autant qu'il peine à susciter l'intérêt du spectateur assidu, recherché autant qu'il s'avère incomplet sur le plan cognitif. Sans doute Netflix a-t-il fourré son nez dans le projet et en aurait altéré la moëlle, mais la sauce ne prend pas et ne suscite aucun sentiment ; restent ses qualités esthétiques et recherches historiques indéniables.
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Créée
le 19 janv. 2021
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