Il y a des films qui sont hypnotiques, araignées tissant lentement leur toiles et finissant par vous étouffer par leur talent. Marie Stuart, Reine d’Ecosse, qui n’est pas exempt de défauts, est de ceux-là.


Le début du film de Josie Rourke est très énervant : venant du monde du théâtre, elle adapte le scénario de Beau Willimon (House of Cards) façon arty : poses hiératiques mimant les tableaux de Georges de La Tour, effets de costumes post-modernes, au milieu de scènes plus classiques, ce qui finit par ressembler à un mélange douteux de réalisme et de posture. Mais comme Mrs Rourke ne franchit pas vraiment le gué, c’est agaçant. Ce que réussit la Reine Margot échoue ici, faute de conviction cinématographique très sure.


Mais petit à petit, au rythme de la musique entêtante de Max Richter, le film s’impose. D’abord en focalisant sur la perdante, Marie Stuart, Reine d’Ecosse et prétendante au trône d’Angleterre, contre l’héroïne habituelle, Elisabeth Ière. La reine vierge d’Angleterre, est habituellement présentée comme la courageuse unificatrice protestante du royaume, contre les méchants complots catholiques, de Bloody Mary (Tudor, sa demie sœur) à Marie Stuart, sa cousine. Tout cela étant fortement documenté dans le cinéma Hollywoodien, d’Elizabeth : l’Âge d’or aux Tudors, en passant par L’Invincible Armada avec Laurence Olivier et Vivien Leigh ou La Reine Vierge avec Jean Simmons et Stewart Granger.


Mais là, c’est comme si on assistait à Secrets d’Histoire, avec Stéphane Bern réhabilitant l’indomptable Marie Stuart contre la méchante Elisabeth. Nous laisserons au Prince d’Avalon le soin de tirer le vrai du faux historique, car l’essentiel n’est pas là. Nous sommes au cinéma, et Josie Rourke réussit à bâtir, avec l’aide de deux incroyables actrices, de véritables personnages. Avec Saoirse Ronan dans le rôle de Marie, et l’incroyable Margot Robbie*, dans celui d’Elizabeth, la réalisatrice bâtit un véritable antagonisme de cinéma, avec leurs forces, leurs faiblesses, et leurs doutes. On sort progressivement du film scolaire pour atteindre, dans une scène de rencontre (inventée) dans une buanderie, à l’essentiel de la tragédie ; alors que leur détresse commune devrait les rassembler, Marie agit au contraire de ses intérêts et cause sa perte.



  • Margot Robbie a interprété en quelques années une incroyable galerie de personnages, en premier ou second rôle : reine frigide dans Marie Stuart, Reine d’Ecosse, white trash enlaidie dans Moi, Tonya, teenager déjantée dans Suicide Squad, top model dans Le Loup de Wall Street… Série en cours

ludovico
7
Écrit par

Créée

le 15 mars 2019

Critique lue 162 fois

ludovico

Écrit par

Critique lue 162 fois

D'autres avis sur Marie Stuart, reine d'Écosse

Marie Stuart, reine d'Écosse
Fêtons_le_cinéma
3

Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine

Marie Stuart, Reine d’Écosse réécrit l’Histoire à la lumière anachronique des enjeux sociaux-culturels contemporains et, en inscrivant cette relecture dans un cadre strictement historiciste où tout...

le 21 févr. 2019

40 j'aime

1

Marie Stuart, reine d'Écosse
Grimault_
5

Seules contre tous

Les films d’époque sont en vogue ces temps-ci. Après le remarqué et acclamé La Favorite, Marie Stuart, Reine d’Écosse débarque et propose un biopic tout aussi généreux en terme de décors et de...

le 1 mars 2019

27 j'aime

6

Marie Stuart, reine d'Écosse
Burnham
1

Comment en est-on arrivé là ?

"Comment en est-on arrivés là ?" Justement, on ne sait pas et j'aimerais le demander à la réalisatrice et aux scénaristes ! Cette phrase est prononcée par Marie Stuart lors de sa rencontre avec...

le 19 févr. 2019

26 j'aime

4

Du même critique

Shining
ludovico
9

Le film SUR Kubrick ?

Après le flop public et critique de Barry Lyndon, Kubrick a certainement besoin de remonter sa cote, en adaptant cet auteur de best-sellers qui monte, Stephen King. Seul Carrie a été adapté à cette...

le 7 févr. 2011

191 j'aime

86

La Neuvième Porte
ludovico
9

Un film honteusement délaissé...

Un grand film, c’est quoi ? C’est un film qui passe sur NRJ12 (en VF mal doublée), qu’on prend au milieu, et qu’on regarde jusqu’au bout, malgré l’alléchant Mad Men S05e1 qui nous attend sur Canal à...

le 23 janv. 2011

58 j'aime

3

Borgia
ludovico
3

on y a cru pendant vingt secondes, jusqu'au générique...

C'est parti pour la série événement de Canal+. Ils sont forts chez Canal, ils ne font pas de série non-événement ! Mafiosa, Braquo, Borgia : même combat. Pour cette dernière, on y a cru pendant vingt...

le 14 oct. 2011

41 j'aime

13