J'aime beaucoup Wise, même si on peut dire que j'ai pas vu tellement de ses oeuvres, mais j'aime beaucoup Wise.
Une petite série B à base de grosse boite de conserve cracheuse de rayons désintégrateurs et d'assiette qui vole et une histoire de baraque hantée qui avait taquiné mon échine d'un léger frisson suffisant à me présenter ce type comme un conteur hors pair, peut-être l'un des meilleurs que ce siècle passé ait engendré, doté dans son art d'une justesse profonde et d'un sarcasme singulier.


C'est donc son nom avant tout qui m'a poussé à découvrir ce film dont je ne savais absolument rien jusqu'au moment du clic sur play. Et me voilà devant le meilleur film sur la boxe que j'ai jamais vu.


Rocky Barbella est une tête brûlée, une hyène furieuse, un sagouin de bas étage, petit voleur sans grand honneur ni scrupules, il n'a de respect pour rien. Mais c'est aussi un sanguin virulent que la vie a balafré, le dotant du poids d'une crasse familiale sans repères, d'une rage viscérale autodestructrice et de poings d'acier. Rocky est un moins que rien et il n'a pas l'intention d'y changer quoi que ce soit, sans la moindre estime de soi... Mais si on lève la main sur lui, il rend les coups avec les intérêts.


L'histoire le suit au cours de son périple, des bas-fonds de New York jusqu'aux projecteurs de Chicago, passant de furet fugitif dans les ombres délavées des ruelles pourrissantes de son giron natal à taureau déchaîné à l'oeil écarlate dans l'arène. Rocky n'est pas un bon tacticien, ce n'est même pas un grand boxeur, mais c'est un putain de cogneur habité par un volcan bouillonnant tirant sa source d'un passé de rejets et de non-dits. Sa vie croupit dans une lie de merde, et il la traverse comme un bulldozer aveugle et sourd, jusqu'à ce que ses poings haïs lui montrent la première marche.


Wise dépeint la vie de Barbella avec une grande finesse, faisant de son film tant une cicatrice souillée sur le monde de la boxe, place éphémère de haine et de vice, qu'une ode au Noble Art, air de combat et de révélation, où un homme apprend à tenir droit, stable sur ses gambettes, et parvient à se réaliser. Pour un temps.
Et les acteurs y sont tout bonnement miraculeux, Paul Newman plus touchant que jamais dans son rôle de gredin honteux, tête baissée, fuyant les regards et esquivant les responsabilités comme la peste, devenant soudainement habité dès qu'il pose le pied sur le ring. Face à lui, son plus grand adversaire, Pier Angeli, incarnant Norma, sa femme, est exceptionnelle de présence, joli minois teinté de fougueuse détermination, elle semble bien plus résistante qu'une dizaine de poids lourds. Et juste pour dire, on note aussi l'apparition furtive de Steve McQueen, se contenant de quelques minutes pour marquer le regard, alors que le monde ne savait pas encore qu'il était le plus grand acteur du monde en devenir.


Biopic sur la vie de Rocky Barbella, on dit qu'il est d'une sincérité et d'une honnêteté rares, replaçant les faits avec un respect des plus méticuleux. J'dois bien avouer que je n'en sais rien... Mais ce que je peux (re)dire, c'est qu'il s'agit là du meilleur film sur la boxe que j'ai jamais vu. Une des meilleures histoires d'amour aussi. Un des plus poignants drames familiaux également. Un film absolument excellent en fait. Un coup de coeur (presque) inattendu.


J'aime beaucoup Wise.

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le 13 janv. 2014

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zombiraptor

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