Une fois n'est pas coutume, j'ai zappé avant la fin.


Massacre à la tronçonneuse, c'est une franchise mythique, débutée par un classique improbable, puis qui oscilla au fil des opus entre la comédie horrifique et un esprit plus dark ou gore. Le Commencement enterre concencieusemment tout ce passif après l'avoir assomé, débité, écquarrissé et cuit vapeur.
Dans « Massacre à la tronçonneuse : le Commencement », il y a « commencement ». Trivialement, ça signifie qu'on devrait s'y intéresser aux origines de ce mal, à ce qui a pu pousser Leather Face et sa famille tarée à sombrer dans le meurtre et le cannibalisme. L'intention aurait été louable, même si l'inégalable original de Tobe Hooper sous-entendait déjà tout cela..
Mais voila, depuis que George Lucas a essayé dans "La revanche des Sith" de donner une explication rationnelle à l'existence de la Force, tout le monde y va de son cassage de mythe. Comme s'il était tellement nécessaire de tout raconter, ne rien suggérer, pour pouvoir mettre un nom et un visage à un tueur masqué iconique.


Le Commencement est un plantage lamentable. Tout ce qu'il prétendait éclaircir est expédié en l'espace d'un pré-générique risible, du style le mythe Quasimodo du pauvre. De voir à l'écran l'accouchement mal filmé d'un bébé censé être le futur tueur à la tronçonneuse, ça n'est juste pas possible.
Non seulement ces 5 premières minutes bâclées ne mettent donc pas franchement le spectateur dans de bonnes conditions, puisqu'avec jump scare de rigueur, caméra à l'épaule pour faire genre, et couleurs dégueulasse « parce que ça se passe en 1939 »... Mais en plus, tout le reste du récit est affligeant.


Question fondamentale qui aurait dû porter l'ensemble du projet: pourquoi la famille Hoyt est tombée aussi bas ? C'est simple, comme dirait Jamy. L'abattoir qui emploie la famille a fermé, donc la ville se vide et la famille n'a plus un rond. Le fiston attardé a pris goût à la barbaque et a tué à coups de marteau l'ancien patron de l'abattoir ? Pas grave, papounet va buter le sheriff à coups de chevrotine dans la face en sortant deux-trois punchlines réac sorties d'un show de Fox News. Au passage, papounet trempe son doigt dans la blessure du macchabée, suce son doigt ensanglanté, l'air de se dire que finalement c'est pas si mauvais. Le soir même, c'est à dire au point de montage qui suit, papa annonce que le pot-au-feu, c'est pas un pot-au-feu normal puisque c'est ce qui reste du sheriff, et que désormais ça sera comme ça, qu'on restera dans cette baraque et qu'on ne discute pas, parce qu'on a bien une dignité de ploucs à défendre. Puis c'est tout juste si la Ma Dalton de service laisse siffler un « tu n'as pas fait ça, John ? ». La famille se tait, papounet lance « fiston vient te mettre à table », et ça commence à manger, tranquillement. Papounet reprend la casquette du sheriff, et voilà comment on présente comme un sagouin les personnages clés de la saga et qu'on torche avec le cul leur enjeu fondamental. Prrt.


L'ennui c'est que là, on dirait pas mais le film n'a commencé que depuis 10 minutes. Ne sachant plus quoi raconter puisqu'il vient d'expédier ce qui aurait du être le coeur d'un film nommé "Le Commencement", Liebesman reprend donc une-bête histoire de slasher quasi semblable au film dont il est censé être la préquelle : à savoir, une bande de jeunes couillons se retrouve dans ce bled paumé et se font tuer atrocement les uns après les autres après avoir subits divers sévices. La plupart du temps, seul le colosse qui joue Leather Face s'en sort honorablement, et encore c'est peut-être parce qu'il ne parle jamais. Pour le reste, tout est désespérément raté dans ce film. Liebesman ne prend jamais de recul et transforme le brûlot enragé de Tobe Hooper en un torture porn racoleur pour lycéens rigolards fans de Saw 3D. Mal filmé, monté n'importe comment, mal joué, enchaînant les paresses scénaristiques et les incohérences, il n'y a rien à y sauver, tout est mal branlé. Jamais la photographie fadasse ne retranscrit l'ambiance caniculaire et pesante du film de Hooper. Jamais la mise en scène ne vient appuyer la dramaturgie, jamais on ne ressent une once d'appréhension et de suspense. Liebesman n'est même pas foutu de bien cadrer un plan, encore moins aux instants iconiques, par exemple quand LeatherFace se saisit de la tronçonneuse pour la première fois de sa vie. Parfois même, des plans sont réutilisés par fainéantise, comme ce cadrage sur la maison du massacre. Pour un film produit par Michael Bay à 16 millions de dollars, quand Tobe Hooper s'est démerdé avec 15 000 dollars, c'est la honte !


En fait, et pour résumer, Le Commencement n'est pensé que comme une très longue bande-annonce. Il en reprend les codes, le découpage et l'esthétique racoleurs, rythmé uniquement par les jump-scares et le bon vouloir d'une musique artificielle et agaçante. Mais qui a envie de se taper une bande-annonce d'1h30 ?


J'ai zappé au bout d'une heure, après le premier tronçonnage. Je vous propose donc de trouver cette scène (assez supportable quand même, il faut bien plaire aux mômes qui bouffent le pop-corn) sur youtube, et de la comparer avec le passage similaire de l'opus de 1974. Vous comprendrez alors mon agacement. Le « Texas Chainsaw Massacre » de Hooper n'était pas sans défauts de réalisation, mais il avait cette touche viscérale, iconoclaste, avec de vraies audaces de mise en scène, que ne possède pas du tout ce pâle épisode pété de tunes et qui sent le soda. Non, pour que Le Commencement ait été une réussite, il aurait fallu un autre script, un vrai réalisateur... Peut-être même, ne pas faire un film d'horreur, au profit de la psychologie des personnages, si fondamentale dans une préquelle? Croyez-moi, Le Commencement représente ce que le cinéma d'horreur fait aujourd'hui de plus racoleur, putassier, facile, bâclé et vide de sens, bref, le gore calibré pour les 12-15 ans.


Ah et puis, c'était pas la peine de caser Jordana Brewster dans cette galère si c'était pour interrompre sa scène de baise juste après les préliminaires.

Biggus-Dickus
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le 9 juil. 2014

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Biggus Dickus

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