Alors qu'il avait atteint les sommets du 7ème art avec son chef d'œuvre Mommy (Prix du Jury à Cannes en 2014), Xavier Dolan présente son 8ème film, Matthias et Maxime. Un film sur l'amitié et la difficulté de communiquer avant tout, mais les thèmes chers au prodige québécois sont également traités, à savoir le rapport mère-fils, l'homosexualité ou encore la quête identité et la découverte de soi. Le long-métrage de Xavier Dolan est une nouvelle fois très personnelle, ce qui fait écho aux dires du réalisateur "le défi, c'est d'être moi-même".
Je me demande réellement plus tard quand il regardera sa filmographie, quel film il dira être le plus personnel. Quelque part, il n'y aura sûrement pas de réponses puisque sa filmographie représentera un ensemble très personnel.
Matthias et Maxime montre l'histoire de deux amis qui, pour les besoins d'un film amateur d'une connaissance, vont s'embrasser et ce, 12 jours avant le départ de Maxime pour l'Australie. À partir de là, ils ne vont plus appréhender la vie ni l'existence de la même manière.
Dans ce film, on retrouve les gimmicks de réalisation de Xavier Dolan, à savoir les flous artistiques, les ralentis ou encore l'utilisation abondante (excessive?) des gros-plans. D'ailleurs, Xavier Dolan nous donne le ton dès le début du film à travers le personnage Matthias quand ce dernier dit à Maxime et donc au spectateur "Are you ready for the close-up?".
L'habituel mariage pop/classique est également de mise.
Le spectateur réussit à s'immiscer dans la vie de Matthias et de Maxime (et de leurs amis communs) grâce à la caméra épaule très utilisée tout au long du film et évidemment aux gros-plans sur les visages des personnages. La question souvent chez Dolan, et plus largement au Cinéma, c'est de savoir si la forme est à la hauteur du fond.
La communication est au centre de l'histoire, qu'elle soit conflictuelle (entre Maxime et sa mère), qu'elle soit langagière (la réalisatrice qui est très américanisée et à qui on reproche son vocabulaire très anglicisé ou le fait que Matthias reprenne ses amis pour des fautes de français) qu'elle soit visuelle à travers les échanges de regards entre les personnages. Les regards sont importants car ils signifient parfois plus que des mots, ce qui est symbolisé par la dernière scène du film où le regard suffit ou encore la déclaration de Francine à Rivette "La vie continue même si tu te tais."
Ce film confronte également les générations, mais n'est pas un film générationnel. On voit encore une fois un défaut de communication entre les mères adultes et les jeunes amis trentenaires. Les mères sont d'ailleurs représentées négativement, à l'exception de Francine, la mère bienveillante de Matthias.
Enfin, parlons des cadrages qui interpellent et qui montrent à quel point Xavier Dolan est rigoureux et minutieux. Les moments forts entre Matthias et Maxime et où l'intensité dramatique est élevée sont à chaque fois filmés à travers une fenêtre comme si Dolan souhaitait montrer que les deux personnages sont dans un cadre, écartés des autres et du temps. Le cadre met en relief la proximité des personnages. En effet, à partir du moment où les deux individus se sont embrassés, à chaque plan, ils vont être à distance ou séparés par quelque chose (et encore une fois, il s'agit souvent d'une fenêtre : on voit un personnage au premier plan dans la maison, et à l'arrière plan on voit l'autre personnage à travers la fenêtre) jusqu'au moment fatidique où Matthias va s'aventurer dans cet espace Maximique qu'il s'était interdit de franchir depuis la confrontation de leurs lèvres. Lors de cette scène intense, l'orage vient rythmer les respirations fortes des deux individus électrisés.
Il est intéressant de noter que Dolan fait le choix de ne jamais laisser entrevoir la scène où les deux s'embrassent quand bien même les personnages du film la regardent. À mon sens, cela montre que les personnages n'assument pas réellement et refusent de voir une réalité qui apparaît par le prisme fictif.
Finalement, le film n'a pas la fraîcheur des Amours Imaginaires, ni la carrure de Mommy mais reste un très bon film sur l'amitié et la difficulté de communiquer.
On retrouve du Dolan, dans un film écrit, réalisé et joué par Dolan.
Et s'il y a quelque chose à retenir de ce film, c'est la phrase de Kevin "We're not people, we're animals" pour justifier son infidélité parce que de toute manière "We don't possess anyone". Alors, même si son rôle est très secondaire et peu important, il porte un discours assez controversé qui devrait faire débattre plus d'un.
Ce film est reparti du Festival de Cannes sans aucune distinction, et quelque part ce n'est pas scandaleux tant la sélection officielle était relevée cette année. (cc. Parasite)