Je conçois tout à fait qu’on puisse ne pas aimer Mektoub, My Love: Canto uno.


Oui, le film dure 2h50, mais j’aurais presque voulu que ça continue. Oui, Adbellatif Kechiche se fait plaisir lorsqu’il filme les filles, mais après tout c’est un film sur le désir, du point de vue d’Amin. Oui, le soleil semble se coucher en permanence, mais il faut admettre qu’on était prévenu avec les deux citations sur la lumière en ouverture. Oui, le passage de la naissance des agneaux est long, mais c’est finalement un moment marquant. Non, rien de tout ça n’est grave.


C’est un film qui m’a touché personnellement. Voyez-vous, j’ai moi aussi grandi dans une petite ville côtière, réputée pour ses plages et pour ses vagues. Lorsque j’avais autour de 20 ans, j’ai moi aussi connu ces longs étés insouciants à la maison avec les copains. Ces journées partagées entre plage et job d’été pour certains, ces soirées où nous prenions notre temps pour finalement rentrer au lever du soleil et remettre ça le lendemain sans prétexte aucun et parce que la gueule de bois n’était pas de notre âge. Au même titre que les personnages du film, notre insouciance et notre manque d’obligation étaient synonymes de liberté : nul besoin de s’appeler à l’époque, on savait où se rendre et on verrait bien qui on y trouverait.
Les rencontres avec les touristes de passage duraient parfois une heure, parfois un jour, une nuit, parfois même une semaine voire plus et rythmaient le scénario de ces deux à trois mois que nous passions majoritairement en maillot sans jamais penser à ce que Septembre nous réservait.


Le film a donc éveillé en moi une nostalgie certaine car ces personnages, je les ai tous connus. De la petite bourgeoise qui voulait vivre une aventure mais se rend compte que ce n’est pas son monde à cette fille qui veut être au centre de l’attention, de l’infatigable charmeur à celui qui, de facto, se retrouve un peu en retrait. Abdellatif Kechiche réalise un métrage qui est une ode au désir, à la liberté (à la vie ?), et il le fait bien. Il prend son temps, car pendant ces étés-là une semaine semble durer un mois et une simple soirée contient de nombreux rebondissements. Les conversations, pourtant d’apparence banale, révèlent à chaque fois un peu plus la nature des personnages et permettent de vivre le présent. Shaïn Boumedine est admirable, Ophélie Bau tout autant ainsi que Salim Kechiouche. On sent leur évolution, ou stagnation pour certains, et on se prend à rêver d’un retour à nos 20 ans, juste pour quelques temps, afin de retrouver cette époque où nous n’avions pas encore de responsabilités pour nous empêcher de profiter de notre jeunesse et où tout paraissait plus simple.


Summertime and the living's easy…

Créée

le 11 sept. 2018

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Jake Elwood

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