La lecture du scénario doit être barbante, pourtant une magie opère

C'est bizarrement un chef d’œuvre qui peut hanter longtemps.

Bizarrement, parce qu'il commence assez mal : une ouverture esthétisante à forte teneur en images de synthèse avec un filtre àlacon qui ressemble davantage à une publicité pour du gel douche. Il y a aussi quelques plans ratés ou hors de propos ici ou là : un certain jeu d'ombres "à la Peter Greenaway" un peu forcé. Une scène voyeuriste qui enlève un peu de force au film.

Mais chef d’œuvre quand même parce qu'il arrive à faire passer des émotions nouvelles au cinéma par l'intermédiaire de choses en apparence banales ou surfaites (et même ratées, voir plus haut). La fête de mariage caméra à l'épaule semble un cliché. La pléthore d'acteurs célèbres sur l'affiche ne rassure pas car elle aurait pu compenser un vide scénaristique. Pourtant, la magie opère, sans qu'on comprenne vraiment comment ni d'où elle vient.

Mes réflexions en vrac :

La musique est très importante, il me semble que contrairement aux autres films de Trier, celui-ci n'utilise qu'une seule musique de bande son (en excluant la musique qui sort de hauts parleurs dans l'histoire) ce qui lui donne une force particulière puisqu'elle est assimilée au thème central autour duquel "gravitent" les personnages. C'est un "truc" narratif peu utilisé au cinéma.

Le thème central qui est assez concret puisqu'il s'agit de la dépression (et du deuxième film de ce qu'on considère la trilogie de la dépression de Lars von Trier). C'est un point qui peut rebuter le spectateur ignorant qui verrait de la paresse dans cette maladie. Mais le film en parle affreusement bien, ce qui doit "parler" à ceux qui y sont sensibles.

C'est un huis-clos qui ne ressemble pas à un huis-clos. On le ressent sans forcément le remarquer.

Des acteurs célèbres en léger décalage par rapport aux rôles auxquels ils ont pu nous habituer, ce qui crée une forme de nouveauté ou de surprise (voire de malaise).

La force du film vient peut-être de ce qu'il nous fait ressentir très familièrement : ce que l'on peut ressentir de vanité (d'insignifiance) en regardant les étoiles. J'ai envie d'ajouter que je lis parfois que le cinéma de Lars von Trier serait prétentieux et que je suis en désaccord total à ce sujet. Son cinéma est du cinéma populaire. Ce qui fait son intérêt et sa différence, c'est que malgré cette simplicité formelle, il ne prend pas les spectateurs pour des imbéciles ou des enfants à cajoler.
fulibor
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le 24 janv. 2015

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