Deux grandes réussites sous-tendent Mænd & Høns. La première est à chercher du côté de ses acteurs, tous impeccables dans des rôles à la croisée de l’humain et de l’animal, aussi imprévisibles qu’attachants, aussi déréglés que progressivement domptés par un spectateur qui apprend à les regarder, qui semble même les comprendre. Que Mads Mikkelsen soit un grand acteur n’est plus à prouver, et sa performance ici – oui, une performance – le rappellera sans difficulté. La seconde réussite tient à l’atmosphère étrange qui plane sur l’ensemble du long métrage, une pesanteur aussi diffuse et légère que les protagonistes sont instables. La partition musicale de Frans Bak et Jeppe Kaas y est pour beaucoup, oscillant entre une écriture évoquant celle d’Alexandre Desplat – la piste « Montage » est sous perfusion Desplat – et un thème sous forme de comptine rendant hommage, entre autres, à celui de Poltergeist signé Jerry Goldsmith. Une partition hybride pour un film qui l’est tout autant, quoique sa bizarrerie perde un tantinet de son mystère à mi-parcours, une fois la famille réunie.


La principale limite de Mænd & Høns est sa faiblesse de mise en scène qui se contente de répéter les mêmes mouvements sans les penser ; quelques idées relatives au comique des situations, comme ce frère tombant derrière la vitre de la garderie ou ses footings impromptus, rehaussent un ensemble sinon moyen et fainéant. Nous aurions aimé, plus qu’une thématique centrale axée autour de la chimère, que la forme même du long métrage soit chimérique, ose l’hybridité, cultive les changements de tons. Or, l’impression est celle de se retrouver à table avec la famille de Leatherface, sans la folie et l’imprévisibilité qui la détermine. En somme, Mænd & Høns vaut le détour pour le cynisme avec lequel il aborde la vie et sa sacralité, revisitant le couple Éros et Thanatos avec une originalité certaine ; aussi pour ses acteurs et son ambiance générale. Mais il aurait pu être bien plus.

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le 25 juin 2020

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