Le fusil de Moreau

Le premier long-métrage de la journée, c’est le danois Mænd & Høns (Men & Chicken) de Anders Thomas Jensen, avec entre autres Mads Mikkelsen transformé en accro au sexe, moustachu et bec de lièvre, qui raconte l”histoire de deux frères qui découvrent avoir été adoptés, et décident de partir à la rencontre de leur père biologique, un généticien du nom de Evelio Thanatos vivant reclus sur un île énigmatique. De ce postulat légèrement éculé, Jensen dévoile au fur et à mesure du film une galerie de personnages tous attachants bien que monstrueux, et un univers bien plus sombre que ce que ne laisse présager le ton léger de la première partie du film. Jensen essaime quelques indices ici et là, dans les noms où les comportements de personnages, tous ayant des caractéristiques bien plus que distinctes, et plus importantes qu’une simple gag. Rien n’est ici laissé au hasard, prouvant que Men & Chicken est maîtrisé de bout en bout. Le réalisateur va aussi bien piocher du côté de l’univers de Terry Gilliam que de Sanatorium Pod Klepsydra de Wojciech Has, en passant par l’Île du Dr. Moreau (le roman pas les films) de H.G. Wells. Le mélange improbable de toutes ces références permet au film de prendre une toute autre ampleur en engageant la réflexion sur des thèmes comme l’évolution, la génétique, l’eugénisme, la religion ou encore les normes sociétales. Malgré la densité du propos et la profondeur de la réflexion, Men & Chicken ne sombre jamais dans le pessimisme psychologique facile, et tout en gardant un humour noir acide et sévère, s’ouvre à un optimisme presque naïf devenant ainsi une œuvre ambiguë, en transformant alors la quête d’identité de deux frères en un véritable cours de sciences naturelles amélioré.

Tiré du journal du festival des Hallucinations Collectives 2016 : lire l'article entier sur mon site...