On ne peut pas dire que Merlin l’enchanteur enchante la relecture effectuée par Disney de la légende arthurienne. Ici tout est plutôt convenu, le rythme s’avère mollasson et l’animation basique ; le faible budget du film se ressent à chaque plan et nuit grandement au souffle épique que l’on était en droit d’attendre d’une telle œuvre. 3 millions de dollars pour animer la matière de Bretagne, c’est bien peu ; d’autant que la magie exige des tours et des transformations forcément plus coûteux. À titre d’exemple, La Belle au bois dormant nécessita un budget de 6 millions de dollars. Mais au-delà des contraintes financières, le film pèche par sa trop faible créativité : quelques plans créent une vie forestière malsaine et réussie, certes, Archimède campe un personnage haut en couleur et très drôle ; manque pourtant une patte graphique et musicale qui aurait conféré au métrage une identité. En se revendiquant récit d’apprentissage, Merlin l’enchanteur ne délivre à son jeune élève (et donc à son spectateur) que des poncifs sur la vie et le danger. Le professeur, sorte de vieux mage un peu gâteux, se plaît à cultiver l’anachronisme, choix qui a pour conséquences d’amuser la galerie – encore que – mais de ne pas construire un apprentissage à proprement parler. Le Moyen Âge est absent, réduit à son seul pittoresque final avec chevaliers, épées et tournoi, qui ne représente qu’à peine cinq minutes. Dès lors, le parcours intérieur d’Arthur s’avère trop ludique et approximatif pour réellement convaincre, et sonne davantage comme le prétexte scénaristique à un enchaînement de sketchs. Le film se clôt sur une formule anachronique de Merlin qui donne à réfléchir : « Le cinéma, c’est comme la télévision, mais sans incident technique ». Ironie de la part des auteurs ? Car si l’incident technique n’arrive jamais ici, l’incident créatif, lui, semble bien là.