Héritier du roman psychologique français et du cinéma de Truffaut, Mes Provinciales happe sournoisement grâce à ses micro-récits et son verbe plein de verve, généreux mais mesuré.
Tout d'abord saluons la remarquable performance d'Andranic Manet, Etienne dans le film, parfait inconnu jusqu'alors, grand héros romantique, géant si fragile, aux défauts et vertus du jeune étudiant de lettres ou de cinéma, égoïste, rêveur, idéaliste, épris de beauté, mélancolique et lascif. C'est autour de lui que gravitent le récit et ses ramifications sur des sujets tels que l'amour (et ses pendants: la jalousie, l'envie, le désir, le rejet, le mensonge et la tromperie), l'amitié, l'art, la politique, l'engagement, …, le tout très adroitement agencé dans une structure psychologique.
Sans effort de mise en scène ou recherche de plans de génie, Jean-Paul Civeyrac mise principalement sur le narratif et le sensible à travers des personnages lecteurs et penseurs, en proie à de louables interrogations philosophiques et morales aussi modernes qu'intemporelles (le beau, le juste, le bien, etc), préférant sans l'ombre d'un doute d'intelligentes joutes verbales enlevées aux ridicules concours de bière pong (ce qui a dû déboussoler le critique de cinéma du NY Times Teo Bugbee qui a descendu le film).
Un hommage à l'éternelle jeunesse romantique, bercée par la poésie de Nerval, les concertos de Bach et le cinéma de Paradjano.