Adapter une série aussi importante que Miami Vice comporte de grands risques. La série est un pan entier de la culture des années 80, et Sonny et Ricardo est un des duos les plus mythiques de la télévision. Je n'ai pas connu la série à l'époque de sa diffusion. Il a donc fallu que je regarde quelques épisodes majeurs avant de commencer cette critique, pour pouvoir juger son adaptation sur le grand écran.


Michael Mann a produit la série. Il connaît mieux que nous tous ses rouages, et a dû gérer les attentes des fans de la série qui a plus de 5 saisons en seulement 2h15.


Il n'a pas raté le coche. Le film est un gros épisode de Miami Vice, et arrive à à nous montrer la structure de la série. Mann insuffle en plus une substance à son film qui lui permet d'exister au delà de la série qu'il adapte.


Le choix des deux acteurs est cohérent : Colin Farrell (Sonny), joue très bien le bad boy, et James Foxx (Ricardo) est comme à son habitude très juste avec un jeu sans fioritures.


Le scénario ne tombe pas dans le piège d'être un clin d’œil appuyé à la série. On rentre à 1000 % au cœur d'une unité spéciale qui lutte contre des cartels de drogues. Pas de plaisanteries, pas d'humour potache, pas de générique coloré, seulement une immersion dans un univers où règne une tension palpable, où les flics s'infiltrent profondément dans un cartel, où chaque erreur se paiera très chère.


C'est plutôt bien vu de la part de Mann qui choisit aussi de réduire au strict minimum les dialogues entre les personnages principaux. Je pense que c'est une excellente chose. Ils se connaissent par cœur, ils travaillent ensemble depuis des années, pourquoi aurions-nous besoin de les entendre converser entre eux à chaque scène ? Il suffit de les observer : un regard suffit pour que les deux coéquipiers se comprennent, et lorsque qu'ils se parlent, ils sont francs et directs comme le feraient de véritables coéquipiers,. Ils agissent entre eux comme des confrères, mais pas comme des confidents.


Malgré tout, ce ne sont pas des coquilles vides: chacun possède ses propres démons. Ils sont tout les deux infiltrés, mais Farrell flirte avec le danger avec ses initiatives qui frôlent l'insubordination et son tempérament volcanique, tandis que Foxx reste concentré sur son travail. C'est extrêmement fidèle à l’œuvre d'origine, tout en accentuant le conflit intérieur qui rongeait déjà Sonny dans la série.


Là où celle-ci nous montrait un policier trop investi dans son travail, délaissant sa vie personnel, le film lui, montre un homme prêt à tout risquer pour son activité, mais torturé à l'idée de se séparer de la personne qu'il aime, et qui lutte pour ne pas tout plaquer pour rester avec elle.


Cela est dû par l'apparition du personnage féminin incarné Gong Li, qui m'a beaucoup plu. Loin d'être simplement une histoire d'amour classique pour le personnage de Sonny, elle sera à la fois une source de bonheur immense et en même temps un grand regret, un amour impossible pour notre héros qui même s'il l'accepte, n'arrive pas à cacher sa peine : "C’est une mauvaise idée. — On n’a pas de futur. — Alors pas de quoi s’inquiéter. ».


On est loin d'une relation classique d'un film policier où le gentil tombe amoureux d'une belle princesse et la sauve des griffes du méchant.


La réalisation de Mann elle, est toujours aussi belle à mes yeux avec des plans soignés (la scène d'introduction dans la boite de nuit est un très bon exemple), couplé à une ambiance contemplative et aérienne qui fait toujours mouche. La plupart des musiques sont excellentes, et même si je trouve la version de In the Air Tonight par le groupe Nonpoint pas dingue elle colle plutôt bien à l'ambiance du film. Les scènes d'actions sont rares, mais sont précises et minutieuses comme le serait une véritable intervention d'une unité spéciale. Les armes ne sont sorties qu'en dernier recours, et sont utilisées de manière chirurgicale, avec une action lisible pour le spectateur. C'est beau, bien filmé et bien cadré.


Le film a quand même quelques défauts à mes yeux.
Je reste un peu sur ma faim avec le grand méchant qui est bien moins intéressant que son sous-fifre, très intelligent et rusé. Le personnage de Ricardo aurait mérité quelques scènes supplémentaires pour montrer la palette complète du personnage (qui n'est pas qu'un simple coéquipier pour Sonny). Le scénario est plaisant et à le mérite de proposer une histoire inédite par rapport à la série, mais ne révolutionne rien (l'histoire d'amour est quand même sympa pour le genre).


Le film traîne une mauvaise réputation que je trouve au final assez injuste. Loin d'être un film ennuyeux (à cause du manque de scènes d'actions pour certains), c'est une plongée presque documentaire dans la peau de deux flics infiltrés à Miami, avec une belle réalisation et un scénario correct. C'est une très bonne adaptation d'une série très populaire, et dans l'histoire du cinéma ce n'est pas fréquent !

Elminster
7
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le 20 oct. 2018

Critique lue 271 fois

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