Petit purgatoire
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Souvenez-vous, Millénium se concluait d’une drôle de façon : au sortir d’une enquête morbide, ponctuée d’un « duel » final pas très Blomkvist-friendly, l’ombrageuse Lisbeth roulait tout le monde dans la farine et partait se dorer la pilule au soleil avec le beurre, l’argent du beurre et la crémière. Un soupçon de rupture de ton laissant coi, mais qui s’atténuait d’emblée à la perspective de découvrir la suite de leurs aventures : la question étant alors de savoir ce que nous concocterait le fameux cru suédois sitôt le chapitre Vanger refermé.
Et de fait, cela ne nous intéressera aucunement. En réalité, et dans la droite lignée de ce que développait le premier opus, La Fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette embrasse sans aucune retenue l’exploration de son protagoniste : là où Mikael endosse un rôle comparativement moindre mais toujours essentiel, Lisbeth sera donc mise à l’honneur en se retrouvant prise au piège d’une occulte conspiration invoquant pèle-mêle son passé, l’héritage de la Guerre Froide et, si tant est qu’il faille le mentionner, un nappage de misogynie révulsant.
Dès lors, bien que partageant naturellement un esprit commun avec son aîné, le présent film se pose comme son pendant sur le plan de l’envergure : non pas qu’il abandonne de but en blanc son empreinte intimiste, la genèse du personnage de Lisbeth plaidant en ce sens, mais il est évident que la complexité de son background invoque une « ambition » allant crescendo. La chose se traduit littéralement dans les multiples ramifications de sa trame, quitte à y laisser des plumes en termes de lisibilité, elle qui ne lésinera pas sur les interconnexions imprévisibles au possible : Bjurman cristallise à merveille cet effet en sa qualité de rouage d’une machination politico-personnelle, finalement relégué à un rôle de pion sacrifiable.
Les enquêtes croisées de Mikael et Lisbeth, symboliquement séparés tout du long, confortent également cette nette impression de densité scénaristique, à ceci près que Millénium 2 semble en faire trop : assassinat d’innocents fouineurs, allées et venues de figures tierces, preuves compromettantes, accusation à tort et fuite, sombres dessous et espionnage, règlement de comptes et ressentiment latent… quel schmilblick ! Tout mis bout à bout nous conduit ainsi à la circonspection, l’implication finalement « minime » de Bjurman et, surtout, l’identité et le rôle de Zalachenko jurant de mille feux avec la sobriété auparavant instaurée.
Il émerge alors une drôle de sensation, comme si l’improbable prenait peu à peu ses quartiers, comme en témoigne cette « course-poursuite » menée par un Paolo devenu en un tour de main le sauveur de ces dames : certes, le ballet tout aussi impromptu qu’il engagera avec le cousin suédois de la Montagne (la position du kick-boxeur et les allures de son duel ne sont pas sans rappeler Oberyn) offrira une franche séquence tendue, mais convenons que rien ne nous y préparait. En parallèle de l’investigation musclée d’une Lisbeth parfaite en hors-la-loi insaisissable, Millénium 2 parachève ainsi sa mue en un thriller polymorphe non dénué d’un certain charme… dommage que l’ensemble manque de justesse en somme.
Car au sortir de retrouvailles sanglantes, ponctuées de dialogues incisifs nous renvoyant de plein fouet à la discrète corrosivité du précédent film, le bilan est positif comme mi-figue mi-raisin : du retrait (tout relatif) de Mikael et la « radicalisation » d’une Lisbeth ayant à cœur de lever le voile (et trancher les liens du passé), cette suite aura été aussi surprenante que sujette à interrogation. Reste, en filigrane, cette misogynie continuant de s’incarner de diverses façons, mais c’est bel et bien dans la plus « anodine » (cf. le court échange entre les deux flics en faction) que son caractère répréhensible nous saute le mieux aux yeux.
Créée
le 6 juin 2020
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