Minuit à Paris par dauphin_discret
Quand un réalisateur américain, fût-il Woody Allen, s'installe dans notre capitale pour y tourner un film, il faut craindre la carte postale. Et le cinéaste n'évite qu'à moitié cet écueil : à travers les digressions d'Owen Wilson et sa passion romantique pour Paris, on sent bien que c'est le réalisateur qui parle (comme toujours). Donc Paris est beau, Paris est merveilleux, surtout sous la pluie, il n'y a pas une rue qui ne soit une oeuvre d'art : le film s'ouvre sur 3 minutes de plans fixes de la ville, et on est en droit de s'attendre au pire.
Fort heureusement, on a affaire à tout ce qu'un Woody Allen peut offrir de névroses, de promenades nocturnes, de fantaisie et de personnages hauts en couleurs. Mais si l'idée de départ (un scénariste visite le Paris des années vingt tous les soirs dès que minuit sonne) est fort intéressante, on assiste plutôt à un défilé d'artistes un peu tape à l'oeil : Zelda et Scott Fitzgerald, Hemingway, Gertrud Stein et Picasso, d'accord, mais avec Dali, Bunuel, Lautrec, Gauguin et Degas, ce n'est plus une balade mais un véritable catalogue du Louvre. Et si en plus les américains modernes se résument à de malheureuses caricatures, on se demande vraiment où est passé le Woody du fabuleux Sortilège du Scorpion de Jade ou de l'élégant Scoop.
On comprend bien que le réalisateur nous offre ici un fantasme d'écrivain et de lecteur, mais il lui manque une certaine mesure, une certaine retenue, pour que la magie fonctionne réellement.
Midnight in Paris est un film assez vain bien qu'agréable, auquel il manque le charme discret de la fantaisie des grands films du grand Woody.