Minuit dans le jardin du bien et du mal par BibliOrnitho
Savannah, en Géorgie au début des années 1980.
John Kelso arrive de New-York afin de couvrir une importante soirée mondaine pour le compte du magasine "Town and Country" : le très riche antiquaire et collectionneur John Williams organise comme chaque année sa soirée de Noël dans sa résidence légendaire (Mercer House) du centre historique.
Smoking, robes de soirée et autres signes extérieurs de richesse : toute la panoplie est là, le sud a sorti le grand jeu. John se mêle aux invités, observe et cause ici et là. La soirée s'achève fort agréablement, l'écrivain a toute la matière souhaitée pour son article.
Quand brutalement, le scénario bifurque : au milieu de la nuit, John Williams est arrêté pour le meurtre de son ami Billy Hanson, gigolo notoire. Oublié l'article à paillette : le journaliste flaire une histoire autrement plus intéressante et décide de rester sur place.
Savannah, c'est le grand sud que la caméra du grand Clint transcrit à merveille. Le temps ne s'y écoule pas à la même vitesse que dans les rues surpeuplées de la frénétique Manhattan. L'atmosphère y est toute autre : la chaleur qui nous semble si anachronique en ces fêtes de fin d'année ; le vaudou, très présent en cette partie des USA ; le classicisme et le très fort conservatisme qui baigne l'ensemble de la société ; les blancs au salon et les noirs en cuisine... Ambiance vaguement faulknérienne avec un zeste de "Autant en emporte le vent".
Pourtant la réalité est bien plus complexe qu'il n'y paraît. Le riche accusé est en réalité homosexuel et si la société lui pardonnait volontiers ce travers tant que sa puissance était effective, les mauvaises langues se délient tout à coup alors que l'homme est à terre. Le spectateur croise également le chemin d'un travelo tout à fait irrésistible et celui d'une prêtresse vaudou absolument pittoresque.
Des personnages ambigus à souhait, une société en apparence rangée mais dotée de mesquinerie et de malveillance... et un drame. Un sujet dont Joyce Carol Oates aurait fait ses choux gras et dont Clint se tire brillamment avec une petite note de jazz qui n'est pas pour me déplaire.
J'adore !