Mirage de la vie par Anna_M
Voilà un film bien énervant. Énervant parce qu'il essaie de nous faire passer, avec une subtilité très discutable, une morale hyper christiano-centrée. Agréablement moderne pour son époque -1959, les noirs sont encore très discriminés aux États-Unis- quant à sa façon d'aborder la cause noire (montrer le désir d'émancipation, le sentiment d'injustice terrible, de révolte même, de ces personnes destinées à être esclaves au seul regard d'une couleur de peau, d'une naissance), mais insupportablement puritain dans sa façon de mettre en scène le bien et le mal. Sirk nous sert là de bons gros clichés : la femme blanche et riche, ambitieuse, aveuglée par son désir de gloire face à la femme noire, pauvre, tournée entièrement vers son prochain, qui a su comprendre les autres même si elle a échoué avec sa fille. D'accord, à la fin les deux femmes se retrouvent face à un échec avec leurs enfants, mais le modèle chrétien d'Annie est quand même très nettement valorisé, avec des discours assez pesants sur le jugement dernier et autres valeurs religieuses. Voilà donc pourquoi ce film n'a pas pu entièrement me séduire... Et pourtant, il serait hâtif d'aller s'imaginer que je n'ai pas aimé. Car à côté de ce manichéisme énervant, c'est quand même une belle façon de nous donner envie d'ouvrir les yeux. Sarah Anne, Lora, toutes les deux sont aveuglées par leur ambition et passent à côté de ceux qui seront toujours là pour elles, et qui ont besoin d'elles. C'est assez basique comme message, mais l'émotion passe extrêmement bien. Le jeu des actrices, qui bien sûr est très expansif, est néanmoins prenant. De nombreux passages nous prennent la gorge et nous donnent envie de lâcher nos sels oculaires, même si l'on sait que c'est de l'émotion facile. De l'émotion facile, mais de l'émotion vraie : pourquoi passer notre vie à chercher ce qui est sous notre nez (encore un message bien chrétien...) ?