Le sens moral du collectif, on l’a vu porté dans un élan de camaraderie dans « La Cage Dorée » de Ruben Alves. Aujourd’hui, pour son second long-métrage, il nous revient avec un ressort plus intimiste et social, décrivant ainsi l’environnement dans lequel les femmes évoluent. Il ne s’agit pas d’un concept arbitraire ni redondant, car il reste toujours une couche à rajouter sur le discours de la modernité, tout en dénonçant le subconscient patriarcal du quotidien. Et si son support exploite le revers de la médiatisation à travers l’élection de Miss France, son sujet s’attardera sur l’androgynie et toutes les barrières que la société impose dans la forme. En souhaitant briser les codes, il parvient à faire naître une comédie touchante et séduisante, car notamment portée par un casting incroyablement efficace et pertinent.


Alex, le joyeux des festivités, nous embarque dans les propres pas de son interprète Alexandre Wetter. Il incarne une parfaite mixité entre la robustesse des hommes et l’élégance d’une femme. Ce que l’on peut comprendre chez lui comme une ambiguïté de genre n’est pas vraiment au rendez-vous. Le film part du simple fait de vouloir se forger une identité, par le biais d’une mentalité bienveillante et libératrice. Là où l’on prend le temps d’y réfléchir, c’est aux côtés d’une Lola (Thibault de Montalembert) survoltée et fière de l’être. Il en résulte la force de l’âge et de l’expérience, comme source d’inspiration et de motivation. Le rêve d’enfant n’est pas si innocent, une fois que l’on prend pleinement conscience des possibilités, à ne pas confondre avec opportunités. L’enjeu est avant tout basé sur une reconstruction mentale, comme vient souvent souligner Yolande (Isabelle Nanty) et sa famille symbolisant minorité et indépendance. Malheureusement, cet aspect marginal n’est que très peu exploité, afin de mieux mettre en avant la définition d’une femme, selon les critères des Miss.


Elégance, prestance et féminité seraient les piliers fondamentaux d’une femme. Le souci étant qu’on en attend uniquement un point de vue extérieur et qui mise essentiellement sur les apparences. La vétérane et figure de reine des Miss, Amanda (Pascale Arbillot), incarne bien la scission des codes moraux d’une émission qui surexploite le corps des femmes, au nom de la pérennité du business et de la surconsommation. Entre militante engagée et apôtre de son héritage, elle mène le front contre certaines bêtises humaines, dont on ne peut que signaler, à défaut de pleinement triompher. Ce que chaque participante y gagnerait, ce serait gloire et influence, mais le détour qu’on nous fait prendre au côté d’Alex témoigne d’un sentiment malhonnêteté, que l’on édulcore de nouveau, au service de son ascension féminine. Il se sent plus fort en assumant sa féminité et c’est également ce qui le rend attachant, dans sa démarche lyrique et prudente.


Toutefois, certains points sont survolés alors qu’on y a bien fait trempette et c’est bien dommage de rencontrer quelques impasses. La concurrence des Miss offrait de belles opportunités de creuser encore plus le portrait d’une femme moderne ou plus encore. Et finalement, « Miss » épouse un peu trop le feel-good movie qu’il en devient parfois naïf, car ne prend pas le risque d’exposer ses personnages dans un environnement plus tranchant. Il nous incite pourtant à déguster le plaisir dans sa forme la plus pure et se permet simplement d’arrondir les angles, à l’image du tucking. Le film est à prendre pour ce qu’il suppose être, un fragment d’humanité qui fera du bien au spectateur, le temps d’un défilé et de relooking, sondant avant tout l’âme et l’esprit des reclus.

Cinememories
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le 4 nov. 2020

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