Prémices trahis

À l'approche du cinquième opus Mission Impossible, l'heure était au visionnage de cette franchise d'espionnage devenue incontournable, n'ayant en ce sens pas été des plus assidus en ce qui concerne les aventures d'Ethan Hunt ; seul le premier volet, signé Brian De Palma (rien que ça), consistait en une redécouverte, des souvenirs éparses accompagnant cette adaptation de la série TV originale.

Dans la continuité de cette dernière, ce MI marque cependant une rupture autorisant bien des libertés scénaristiques, ce dont on ne prend aucunement ombrage (pour peu que vous soyez comme moi un néophyte) : les apports successifs de Steven Zaillian, David Koepp et Robert Towne à l'intrigue du long-métrage font en ce sens mouche, tandis qu'au delà de son statut de film de commande celui-ci surprend en bien, dans la mesure où De Palma semble avoir gardé (avec plus ou moins de succès) la mainmise sur la conduite du projet.

Menée d'une main de maître, sa trame riche en complots et volte-face propre au monde des agents secrets s'avère en ce sens bien dosée, entre action distillé avec parcimonie, zeste de gadgets peu ou pas grandiloquents et enfin une mise en scène brillante ; les décors majoritairement européens, couplés à la BO réussie et reprise par Danny Elfman, complètent ce tableau sans fioritures, à l'ambiance savamment élégante.

Dans la forme MI se pare d'autant plus d'un visuel on ne peut plus convaincant, accouchant d'une séquence culte (le vol de la liste NOC, tout en jouant habilement avec nos nerfs), mais aussi d'un final aussi spectaculaire qu'invraisemblable, venant nuancer un réalisme d'ensemble jusqu'ici tangible (hélicoptère + tunnel) ; De Palma aura en tout cas enrobé le tout d'une dimension humaine bienvenue, ceci soulignant la qualité d'une intrigue se démarquant plutôt bien dans le genre (elle ne vire jamais dans le sensationnel).

Toutefois, la narration demeure perfectible, des points d'intrigue se voulant plutôt confus de prime abord ; on pense notamment à la semi-révélation entourant Jim Phelps, d'autant qu'elle n'a pas forcément l'effet escompté, tandis que l'ambiguë relation liant Ethan à Claire nous laisse mi-figue mi-raisin, comme si le film n'était pas allé au bout de son idée (les nombreuses coupes au montage ne sont certainement pas sans rapports).

Pour le reste, le casting est efficient, entre un Tom Cruise s'appropriant aisément le personnage d'Ethan Hunt (une figure plaisante mais pas mémorable jusqu'ici), un John Voight parfait en remplacement de Peter Graves, ou encore les frenchies Jean Reno et Emmanuelle Béart, qui s'en tirent de façon louable... de quoi épauler comme il se doit ce long-métrage décidément captivant.

Sans pour autant atteindre des sommets de tension, compte tenu d'une tonalité épique aux abonnés absents (à l'exception de la séquence en chambre forte), MI tire donc son épingle du jeu, et est une réussite pour Brian De Palma ; le projet étant quelque peu casse-gueule de base, on tient donc là une bonne surprise en soi, nullement affectée par ses (bientôt) vingt printemps.