Missouri Breaks
6.8
Missouri Breaks

Film de Arthur Penn (1976)

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L'ouest profond, pas celui des westerns, avec des gentils shérifs qui flinguent des méchants bandits. Non. Ici c'est montagneux, les nuits sont glaciales, le Canada est pas loin, la nature est belle mais pas franchement accueillante, au mieux on fait pousser trois pommiers et on élève des chevaux. Ca, question chevaux, ce film a dû coûter un brin.

Premières images : trois cavaliers font route vers la lisière d'une forêt. Un des trois demande à un autre, un grand blond, si il est prêt. Le blond, calmement, répond oui.
Ils arrivent au milieu d'un groupe de gens attroupés à la lisière d'un bois.
Tout d'un coup, un ordre. Le cheval du blond part au trot, laissant son cavalier se balancer au bout d'une corde.

Le film est comme ça : les gens tombent sans qu'on y prenne garde. Une longueur, des regards, une scène qui s'éternise... méfiez-vous, quelqu'un pourrait y passer.

L'histoire n'est pas très compliquée : le blond qui s'est fait pendre au début est voleur de chevaux de son état. Il appartient à la bande de Jack Nicholson, et, c'était le seul qui avait de l'humour, apparemment, ce qui attriste profondément Jack Nicholson. Prudent, le Jack demande alors aux hors-la-loi de sa bande si quelqu'un n'a pas une idée, vu qu'apparemment là tout de suite le vol de chevaux c'est un peu compromis.
Nos hors-la-loi ne sortant pas d'un institut supérieur en crimes et délits, ils proposent de se faire une banque ou un train. Ce sera un train (une des deux scènes les plus réussies du film).

Avec l'argent, ils achètent un petit ranch pour leur servir de "relais", c'est à dire de point de repli entre deux coups et d'endroit où cacher les chevaux capturés. La vie au grand air, les travaux manuels, on fait les fous, on boit, on va au bordel, youpi, c'est la belle vie.
Sauf que, comme Jack Nicholson a un sens du défi fort développé, acheter un ranch ne suffit pas. Il achète un ranch à côté du plus riche propriétaire terrien du coin, le p'tit vieux plein aux as responsable de la mort de son pote, au début, là, le bond qui a été pendu.
Héhé, ça sent le roussi tout ça, vous allez me dire.
Surtout que ce propriétaire, l'autorité morale du coin, engage un "régulateur", un chasseur de primes, en gros, pour liquider les affreux (Marlon Brando, impayable dans son rôle de tueur à gages déglingué). Et qu'il a une ravissante fille, qui, allez savoir pourquoi, tombe amoureuse de son ténébreux voisin le fier, le rusé, le barbu Jack Nicholson.

Hum hum. Vous le sentez, là, le conflit de voisinage ?

Le truc, c'est que là-dedans, les apparences sont trompeuses. Les plus beaux personnages sont les truands, qui bien que mal rasés et pas très propres sous les bras, font leur métier dans la joie et la bonne humeur, prenant bien soin de ne tuer personne, des fois que ça alerterait des détectives de chez Pinkerton. De temps en temps, ils expliquent comment ils en sont arrivés là, leur passé difficile, on les comprend. Ils aimeraient bien, s'installer, travailler la terre, vivre du fruit de leur travail. Ils y pensent de plus en plus.

Alors que les "gentils", l'autorité garante des lois de ce pays, est représentée par des lâches sanguinaires. Le p'tit vieux plein aux as était chercheur d'or dans le temps, il a bien trimé pour en arriver là, il est fier de sa réussite sociale, les autres n'ont qu'à en faire autant si ils veulent être craint et respectés. Le "régulateur", Marlon Brando, outre passer son temps à monter n'importe comment à cheval, parler tout seul et bousiller des lièvres avec un shuriken géant, atomise les malfrats avec un fusil de précision à au moins 500 mètres, tendant des embuscades dans tous les coins. Pour ça, on ne plaisante pas, c'est le boulot.

Le film joue avec les stéréotypes, s'amuse à brouiller les pistes, les dialogues sont très soignés même si les monologues de Brando sont parfois un peu fatiguant. La meilleure scène du film : la promenade entre la fille du proprio et Jack Nicholson. Là encore, les rôles sont inversés : persuadée qu'il sort avec elle pour lui faire la cour, la fille du proprio s'énerve, le provoque en lui demandant de descendre de cheval, de se déshabiller et de faire ça, là, tout de suite, sans détours, si c'est vraiment ce qu'il veut. Nicholson a ensuite beau jeu de la calmer et de lui dire que ce n'est pas du tout ce qu'elle croit, qu'il n'est pas de ce bois là et qu'elle ferait mieux d'attendre un peu et de remonter en selle, elle n'en décolère pas. Leurs dialogues,savoureux, remontent à chaque fois l'intérêt du film quand l'histoire s'enlise.

Très bon western, drôle, à contre courant, sans indiens, ni bons ni méchants, qui donne un bref aperçu l'incongruité de la vie sur les bords du Missouri.
VincentJ
8
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le 3 déc. 2012

Critique lue 544 fois

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VincentJ

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