A lire certaines critiques, il est bon de regarder à froid un film s'étant vu décerné un tel prix, de prendre son temps avant de commenter afin d'éviter d'être emporté par la puérile et absurde ambition de faire partie des "preums" à l'ouvrir.
Certes, il y a eu des erreurs dans le passé dans l'attribution de la Palme d'Or, mais ne généralisons pas et évitons le piège narcissique du "plaisir aristocratique de déplaire" (sic).
N'en déplaise à certains, voilà une très bonne surprise que ce Moi, Daniel Blake, dont nous avions si souvent entendu dire qu'il ne méritait pas les lauriers attribués, alors qu'il se révèle plus achevé que Toni Erdmann, à des lieux de l'insupportable Juste la fin du monde, et un poil meilleur que le très bon Baccalauréat.
Tout, ou presque, a été dit sur ce site. Nous ne étalerons donc pas.
Tout d'abord, le personnage ultra attachant, humain, exemplaire, à la fois drôle grâce à son bagou et lourd par son amour inconditionné de la justice et de l'ordre (la moindre petite offense à l'ordre établi le mettant en boule) de Daniel Blake, c'est-à-dire Dave Johns, au jeu toujours très juste.
Puis le constat social, fort, alarmant car réel, montrant l'absurdité d'un système capitaliste élevé à son plus haut degré d'individualisme, message clair adressé aux figures politiques anglaises, et à ne pas prendre à la légère pour notre chère France (Macron, ton projet le plus fou n'est pas le nôtre, soit dit en passant).
Enfin, la maîtrise narrative, l'équilibre entre la froideur d'une société, obéissante et emmurée dans une vie anonyme et l'humanité de Daniel Blake qui ose crier au milieu du désert administratif (et socio-politique), désobéir, s'ouvrir aux autres, les écouter, les comprendre et les aimer.
Certes, pas de mise en scène recherchée, mais de la justesse. Ce qui est loin d'être aussi simple qu'il ne le paraît.
P.S.: La fin, parfois incomprise, plus que vouloir renforcer la charge dramatique du film, qui se veut plus réaliste (comme avait pu l'être un certain cinéma italien) que pathétique comme on voulut dire certains, affiche surtout le point de vue pessimiste de Loach. Ne nous méprenons pas.