Ken Loach remporte une nouvelle fois la palme d'or avec ce film et vu la qualité du festival de Cannes 2016 ça peut surprendre que ce "petit film" arrive à s'imposer. Parce que ce film ne révolutionne en rien le cinéma, il ne révolutionne même pas le cinéma de Ken Loach mais il fait quelque chose d'important, il donne la parole à des sans voix oppressés par un État qui les méprise. Ken Loach montre cette violence, la violence que peut ressentir le pauvre type, malade du cœur qui demande juste des indemnités et que la société actuelle malmène avec sa bureaucratie et avec le numérique.
N'importe qui ayant déjà été à pôle emploi ne peut douter de la véracité du discours, de l'impossibilité de joindre quelqu'un, de la rigueur des services qui finalement font tout pour décourager le demandeur d'emploi.
Plusieurs fois je me suis demandé dans le film si je n'étais pas entrain de voir le Procès, d'Orson Welles, sauf qu'on est bien dans la réalité, avec ces gouvernements dépourvus du moindre sens de justice sociale. Donc accorder la palme d'or à ce film là plus qu'à Ma Loute, Elle ou Toni Erdman (bien que celui-ci soit très politique également) c'est avant tout politique et envoyer un message, pousser les gens à voir ce film en montrant que la société actuelle n'est pas "normale", qu'il y a un problème...
Mais bon, ça a été vain... les gens se sont malgré tout rués en masse pour voter Macron. Il y a encore un travail.
Il reste néanmoins quelque chose du film de Loach, qui n'est pas juste un message, qui n'est pas juste un film politique, c'est avant tout une belle histoire, tragique certes, mais belle malgré tout. On peut sans doute reprocher des choses... reprocher une certaine solidarité en prolétaires limite naïve. Tous les prolétaires se sont unis (on sent le trotskyste qui parle) et là on s'éloigne peut-être un peu de la réalité et un peu plus d'ambiguïté n'aurait pas été de refus à ce niveau là.
Ce n'est donc sans doute pas le Loach que je vais retenir, les deux derniers me semblaient plus aboutis, mais malgré tout ça reste déchirant et le film ose malgré tout quelques scènes plus joyeuses, moins que dans la Part des anges ou Looking for Eric, où finalement la vie malgré l'oppression étatique continue.