MOMMY : Xavier Dolan continue sur sa lancée

Steve est un adolescent compliqué, coléreux, parfois hystérique. Le film débute lorsque sa mère, Diane, vient le chercher alors qu’il se fait virer du centre fermé dans lequel il était placé. La vie commune commence, entre petits boulots et démerde pour Diane, crises d’hystérie, initiatives foireuses et glande pour Steve. L’équilibre semble néanmoins naître lorsque leur voisine, Kyla, entre dans leur vie. Un équilibre à trois, rare au cinéma.


Ce qui frappe dans Mommy, c’est le format de l’image. Xavier Dolan utilise un format original de 1 :1. L’image est donc carrée et resserrée. Le réalisateur prend le parti de remplir le cadre constamment et presque entièrement avec ses acteurs. Le champ laisse peu de place aux décors, aux alentours, qui se retrouvent coincés hors du cadre, dans notre imaginaire. Bien sûr, on sait où l’on est, mais ce n’est pas l’essentiel. Dolan nous met cette histoire passionnelle entre une mère (Diane) et son fils (Steve) en pleine figure. Littéralement car l’image fourmille de gros plans. Quand le moindre objet, élément de décor ou une simple épaule pénètre dans le cadre, il ressert le plan sur le personnage au centre de l’image. Comme une loupe posée sur la pellicule. Dolan nous offre ses personnages, interprétés par des acteurs parfaitement dirigés, et bourrés de détails, du porte-clés fétiche aux ongles peints. Il colle aux acteurs avec sa caméra. Il extirpe d’eux ce qu’il veut, les pousse dans leur sensibilité la plus extrême et la plus fine. Il émane de Mommy une grande force et une sincérité bouleversante, qui proviennent en grande partie du jeu d’Antoine-Olivier Pilon (Steve), instinctif et violent, presque animal. Ses partenaires, Anne Dorval (Diane) et Suzanne Clément (Kyla) sont également admirables et entourent parfaitement le personnage de Steve.

Le temps d’une ou deux séquences, le format de l’image s’élargit, pour nous livrer une bouffée de liberté, parfaitement intercalée dans le scénario. Elle produit son effet, on est bluffé par le changement d’échelle tout comme par la chute de la séquence. Elle permet aussi de voir ce qu’aurait été l’image si Dolan avait tourné dans ce format. Et nous sommes obligés de conclure qu’on n’aurait sûrement pas vu le même film ! Le format carré, encore plus après cet échantillon comparatif, est parfait pour le sujet et la force de Mommy.

Qu’on adhère ou pas au sujet, la forme laisse sans voix, nous scotche au siège, et finalement nous laisse abasourdi quand le générique de fin surgit.
cinephilanonym
8
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le 26 oct. 2014

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