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Cette proposition est susceptible de heurter la sensibilité des personnes n'ayant pas vu le film


Le problème, c'est que le film que propose le réalisateur Hugo Gélin est foncièrement inégal. Cette irrégularité, le film le doit à mon sens au nombre et à la diversité des auteurs ayant participé à son écriture : Hugo Gélin, Igor Gotesman et Benjamin Parent, avec la collaboration de David Foenkinos et Lætitia Colombani pour le scénario et les dialogues. Le problème c'est que tous n'ont pas le même talent et qu'ils ne semblent malheureusement pas sur la même longueur d'onde. Cela explique que certaines lignes de dialogue soient de véritables fulgurances et que d'autres soient d'une platitude lassante. Et lorsqu'on a suivi le travail d**'Igor Gotesman** sur la série Casting(s) (2013) et les films Le Nouveau (2015) et Five (2015), on peut légitimement penser que c'est en grande partie à lui que l'on doit ces fulgurances. Il est le dénominateur commun. Par ailleurs on retrouve sa patte : comique de situation par les quiproquo, comique de mots par les lapsus et comique de caractère porté par des personnages déphasés, benêts mais attachants. Mais c'est surtout une écriture brillante faite de dialogues vifs et efficaces, une maîtrise de la répartie digne des meilleurs matchs de ping-pong. Même si le film n'a pas la prétention de s'inscrire dans cette veine-là, il se réclame toutefois çà et là sous la forme d'hommage aux comédies françaises des années 1990 et principalement du Le dîner de con (1998). Certaines répliques frisent ici d'ailleurs, comme leurs aînées, le culte.


Scénaristiquement le film est plutôt intéressant. L'arc narratif est limpide dans le sens où la structure du conte est clair et qu'il ne multiplie pas inutilement les twists et l'usage du montage parallèle. De plus il reste, malgré sa fin pompeuse et faussement romantique, assez bien construit. Il réussit le pari de tenir en haleine son spectateur car on a envie de connaître l'issue de cette intrigue. Outre K.O. (2017) de Fabrice Gobert récemment, l'uchronie reste relativement originale en France d'autant plus qu'elle est ici traitée sur le ton de la comédie-romantique. Je mettrais toutefois un bémol pour le rôle de Mélanie (Camille Lellouche) que je trouve plutôt mal écrit. C'est dommage que les auteurs aient décidé de ne pas le développer davantage et de le résumer à un rôle de personnage-vitrine, c'est-à-dire un rôle égal à une action.


Outre cela, c'est la mise en scène qui me dérange. Très classique, elle multiplie des poncifs, comme cette scène : les deux amants se chamaillent dans l'eau, leurs corps se rapprochent, ils s'enlacent et se laissent entraîner au fond de l'eau sur un fondu au noir. Vous avez déjà vu cela ? Moi aussi et le problème c'est que le film multiplie ces biais conformistes, si bien qu'il ne ressemble plus qu'à un assemblage d'emprunts çà et là. Pour vous dire, certains plans et dialogues et plus généralement certains choix me paraissaient tellement édulcorés que j'ai cru, et j'espère encore, que cela était un pastiche singeant les travers que peuvent parfois revêtir les comédies françaises. Ainsi, cela participe sûrement au comique du film (je l'espère) mais, faire jouer des acteurs et actrices de 30 ans pour des rôles de lycéens ne fonctionnent pas, surtout lorsque ces derniers s'expriment et se déplacent comme des trentenaires. Le souci est très simple, cela nous fait sortir d'emblée du film. Le comique n'est plus intra-filmique, il est extra-filmique étant donné que ce qui nous fait rire c'est le décalage entre la représentation que l'on a de ces acteurs et leur situation peu crédible dans le film.


C'est un film terriblement frustrant étant donné que le scénario est relativement intéressant, certaines scènes sont hilarantes mais que certains choix scénaristiques, sa mise en scène et certains dialogues sont vus et revus. Frustrant car malgré cela c'est un film qu'on a envie et qu'on ne peut s'empêcher d'apprécier.


Cela reste une proposition, qui ne se prétend ni éclairée ni éclairante mais sincère, en suspens et soumise aux avis contraires et constructifs.

Moodeye
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le 12 avr. 2019

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Moodeye

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