La narcissique Maïwenn qui sort un film sur la dépendance amoureuse, pourquoi pas. Même si les bande annonces donnent envie de fuir, on a adoré Polisse sur beaucoup de points, alors la curiosité est là. Une fois encore, malgré un énorme défaut de rythme et des apartés inutiles, la justesse des situations est déroutante.
Car cet instant où on ne sait plus comment se sortir d'une situation, où l'on veut encore y croire alors que tout nous indique le contraire et qu'il faut s'enfuir au plus vite, à partir d'un certain âge, on l'a tous plus ou moins vécu. L'amour et la dépendance prenant le pas sur la raison et la préservation de soi, Emmanuelle Bercot et Vincent Cassel nous les jouent à merveille. Des personnages qui sont autant condamnables pour leurs choix et actions que malheureusement condamnés à répéter les mêmes erreurs et subir leurs propres cercles vicieux. Si tout tourne avant tout autour d'une femme tentant de sauver sa vie de l'emprise d'un salaud malgré lui, Maïwenn essaie de ne pas trop juger ce dernier. Malgré un rythme trop prononcé, tout aurait pu être parfait sans un problème d'une récurrence trop forte.
Pour cela, parlons de Polisse. L'alternance entre des passages difficiles en émotion et des débauches d'humour , même si le rire est jaune, très bon choix. Mais en plein milieu de tout cela, Maïwenn décide, pour soi-disant ajouter un personnage extérieur qui pourrait nous représenter nous, public, de se mettre en scène elle-même. Tentative à la fois maladroite car tout y est mal amené, mais surtout extrêmement arrogante quand on voit que toutes les scènes qu'elles se réserve servent avant tout à montrer qu'elle se tape Joey Starr. Assez ridicule comme démarche, et dans Mon Roi, il existe aussi un défaut flagrant, qui sera certes moins aberrant mais nous fera sortir de l'intrigue à chaque fois.
Deux périodes donc, dans la vie de notre héroïne. Le récit principal, centré sur une histoire d'amour, de dépendance et de tentative de survie, et un événement plus éloigné, où la métaphore pour expliquer son retour à la réalité est une blessure et un centre de rééducation. Métaphore vulgaire, et qui sera, ironiquement, décrite comme telle. Passage inutile, qui aurait pu alléger le film d'une bonne demie-heure, et qui surtout sera ponctué par...Norman fait des vidéos. Alors qu'on a droit à des scènes qui, quel que soit le ton qu'elles prennent, sont d'une justesse irréprochables, on se targue de grosses lourdeurs soi-disant humoristiques, apportées par Norman fait des vidéos. Alors que retenir ? Que cet espèce d'horreur que nous a pondu Internet fait rire autre chose que des adolescents en quête d'eux-mêmes ? (ces derniers qui finissent par lâcher le faux comique au fur et à mesure qu'ils grandissent) Que Maïwenn, alors que son succès lui procure les plein-droits sur ce qu'elle peut proposer, a été contrainte de mettre en scène l'ignoble rouquin aux millions de vues? On aura du mal à en comprendre l'intérêt, mais le constat est unanime : en plus d'apparaître dans des scènes inutiles, Norman fait des vidéos, par son habilité à ne pas réussir à jouer autre chose que lui-même, et à être mauvais quoi qu'il fasse (quitte à rester dans le cinéma, en plus de ses vidéos dégueulasses, vous voulez qu'on parle de Pas très normales activités, du tout aussi devenu mauvais Maurice Barthélémy?) les gâche toutes. Ca aurait pu être pire, on aurait pu avoir Karin Viard, certes.
Bon, l'envie d'en parler était trop forte. Parce qu'au-delà de ses maladresses épouvantables et décidément récurrentes, Maïwenn a réussi son pari de nous décrire une vision très réaliste de l'amour, du penchant sado-masochiste que cela prend lorsque cela va trop loin ou que le temps a déjà accompli son travail de destruction. 50 nuances de grey, prends-toi ça dans la face, la souffrance est pas toujours dans les fessées.