Moonlight trouve sa principale force dans ses partis pris et sa volonté farouche d’aller à contre-pied des traditionnels gangster movie. Ici, pas de protagoniste qui se complaît dans l’univers de l’illégalité, mais au contraire un jeune en difficulté, timide, seul, qui trouve dans les deals de ghetto un moyen de sortir de la pauvreté. L’originalité de Moonlight est de suivre ce héros à trois périodes de sa vie, incarné par trois acteurs différents (Alex R. Hibbert, Ashton Sanders et Trevante Rhodes). Parce que le personnage est en évolution permanente au fil des années : enfant, Chiron est introverti, seul et devient le souffre-douleur de ses camarades. Ado, il se rapproche d’un de ses camarades et découvre son homosexualité. Adulte, il a su apprendre les codes du ghetto, et s’est imposé, il se fait respecter. Mais à chacune de ces périodes formatrices, Chiron est en perpétuelle recherche du bonheur.
Moonlight n’est pas un film engagé. C’est une de ses plus belles réussites. Visuellement élégant, volontiers contemplatif, le film de Barry Jenkins est toujours dans la délicatesse, et joue sur la sensibilité de son personnage principal. La violence sociale, les ravages de la drogue et de l’homophobie ordinaire n’en ressortent que davantage. Enfin, le film vaut aussi pour sa palette de personnages secondaires. Citons Paula, la mère de Chiron, rongée par le crack, et le personnage de Juan (Mahershala Ali), le dealer à la figure paternaliste, trop rare à l’écran et formidable d’humanité.