Réalisé en 2016 par Barry Jenkins, inconnu du grand public jusqu’ici, Moonlight raconte l’histoire d’une construction, celle de l’identité de Chiron, un jeune garçon homosexuel enfermé dans la violence de son ghetto et les problèmes de sa mère.


Impossible de faire la critique du film sans évoquer un autre chef d’œuvre, Boyhood de Richard Linklater. Si le rythme des long-métrages, séquencés en trois temps (enfance, adolescence, adulte) semble être leur principal point commun, ce n’est pas le seul. Les deux films racontent simplement et gracieusement, la vie. Là où Boyhood en est une ode, Moonlight prend le rôle de projecteur sur une réalité encore jamais abordée au cinéma.
Pourquoi Chiron, enfant chétif et discret, devient-il une montagne de muscles s’exprimant par une virilité exacerbée ? C’est toute la question du film. Tout au long de son œuvre, le réalisateur n’exprimera jamais explicitement ce qui se passe à l’écran. De cette façon, le film dégage une grande subtilité quant au traitement de son personnage principal. Dans Moonlight, c’est le silence de Chiron qui en dit le plus. Un silence qui est accompagné d’une musique classique originale qui semble calquée sur les battements de cœur du héros.

Au-delà de Chiron, le traitement de chaque personnage, à travers un plan ou un échange, est incroyable de profondeur et d’humanité. Tous ont une histoire qui fait ressortir au spectateur une vérité authentique, permise par la justesse de la mise en scène de Jenkins.


D’une simplicité incroyable au premier abord, Moonlight brille grâce à sa mise en scène. Toute la grandeur du film réside dans son équilibre. Il y a tout d’abord la caméra épaule, qui permet un réalisme éclatant, alors que l’œil du spectateur se confond souvent avec celui du héros. Nous sommes plongés au cœur de l’histoire, au cœur de cette lutte constante de Chiron contre les autres et contre lui-même. Cette caméra accompagne les moments durs mais aussi les répits, avec un attachement particulier aux « petites choses », aux gestes des personnages, une caresse, un regard.
Cet aspect « documentaire » du film est sans cesse rééquilibré, contrebalancé par un esthétisme à l’écran donnant lieu à une poésie géniale. The Moonlight, le clair de lune en français, donne à voir une photographie de James Laxton, parfaitement exécutée avec des contrastes de couleurs sublimes.

Évidemment, ce travail de l’esthétisme n’est pas sans défauts. Le réalisateur, qui revendique l’influence de la Nouvelle Vague, tombe quelques fois dans ses travers, que ce soit par une utilisation parfois incomprise du plan-séquence ou par le flou, omniprésent pour rappeler un héros à part, mais qui finit par ressembler à une tape sur l’épaule pour souligner des talents de réalisations pourtant indéniables.


Malgré cela, Moonlight reste un film rempli de poésie. La dernière séquence, qui comprend sans doute une des plus belles fin du cinéma contemporain, se dégage du reste du film. Alors que Chiron s’est transformé en monstre de virilité, le film lui aussi a évolué. Moonlight n’est alors plus un film « afro-américain » ou « qui traite de l’homosexualité » mais, tout simplement, un film d’amour.
ArmandMoreira
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le 7 janv. 2021

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Armand Moreira

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