J.O. Munich 1972 : Spielberg double médaillé d'or

Steven 'The Entertainment King' Spielberg sait bien qu'on l'attend ailleurs.
Le monde entier veut que le champion le fasse à nouveau s'émouvoir mais il souhaite surtout qu'il le divertisse. On veut sans cesse revivre le type de frissons que les aventures vécues dans le passé nous avaient fait connaître. Les frissons des Dents de la mer, Indiana Jones, E.T. , Captain Crochet, Jurrassic Park ou quoi encore ?... C'est ce que montre le public à chaque nouvelle sortie, comme en plébiscitant un petit Tintin dans de toutes petites aventures, tout en n'accordant à l'histoire d'un héro véritable comme Oskar Schindler qu'un succès relatif.
Ce n'est plus seulement ce que souhaite le public, mais les pros sont maintenant unanimes. Trop difficile pour eux d'accepter qu'un type qui peut engranger de véritables jackpots en faisant simplement ce qu'il maîtrise, s'amuse à vouloir jouer les historiens. Historien ! Lui, un américain en plus...
Et puis voilà, avec le projet Munich c'est encore pire... voilà qu'il veut nous faire de la politique ! Meerde.


Car LE Réalisateur ne l'entend pas comme ça. Et il s'engagera bien dans les épreuves où on ne l'attend pas.
Ces épreuves chasses gardées des spécialistes, disciplines où il est quasi-indésirable. Comme maintenant il peut faire ce qu'il veut grâce à la Compagnie et à tout le fric qu'il possède, quitte à perdre pour cela des millions de dollars - ce qui va d'ailleurs se passer avec ce film (23 millions de $ de pertes..) - il nous réalisera bien Munich.
Comment ne pas comprendre que ce juif souhaite pour une fois nous parler de la tragédie de son peuple ?
Moi en fait c'est davantage l'absence d'expression de son point de vue sur cette tragédie qui m'aurait paru égoïste et pas très sérieux de sa part. Cette démarche m'intéresse c'est clair, en revanche, à la vue des notes moyennes sur SC, je ne m'attendais pas à un grand film. Erreur.


Je lui décerne une 1ère médaille d'or dans la 1ère discipline ou il s'engage, l'Epreuve de la Forme.
Comme tout le monde ou presque, j'avais par exemple été skotché par le peps extraordinaire de l'intro du 1er Indiana Jones, ou encore par les visions poétiques et poignantes de la petite fille en rouge de La Liste de Schindler. Tout comme par tant d'autres séquences du Maestro...
Mais là, ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma ma … (stop ! Lol ).
Et bien c'est tout simplement supérieur si c'est possible ! Chaque photo de chaque séquence est déterminée à la perfection. Le style est moins américain ou mondialisé qu'à l'habitude. Les séquences qui s’enchaînent font mêmepenser aux meilleures réalisations politiques françaises des années 70. Sublime ; même si l'on peut lui reprocher cette perfection omniprésente susceptible de heurter par son côté excessif. A l'image de la très (trop) classique affiche.
Le rythme est soutenu, très soutenu, sans jamais s’essouffler. Les séquences de violence ne sont ni trop, ni trop peu présentes.
La BO est très discrète. On peut le comprendre puisqu' Ennio Morricone a raccroché les crampons ! Et qui d'autre aurait pu délivrer une musique intemporelle à la hauteur du projet ? Sincèrement, et sans vouloir lui manquer de respect, j'ai des doutes sur les capacités qu'auraient eu John Williams (le compère musicien habituel du Maestro) à se hisser à un tel niveau, sauf peut-être à lui accorder des délais sans doutes irréalistes. La musique sera donc discrète et servira l'oeuvre plus qu'elle ne la complètera.
Le casting international est juste parfait par l'impossibilité à lui trouver une faille. De même qu'à la performance des acteurs qui profitent de l'évidence des rôles à interpréter (compris les remarquables Matthieu Kassovitz et Amalric aux côtés de l'expérimenté Michael Lonsdale pour un rôle qui semble écrit pour lui) et de leurs talents.


Après cette démonstration, restait donc à négocier l'épreuve la plus difficile et importante dans laquelle il s'est engagé, je veux parler de la discipline reine qu'est l'Epreuve du Fond.
Après les 30 premières minutes j'ai bien eu l'impression qu'un déséquilibre était en train de s'instaurer, que le point de vue sioniste allait malheureusement s'imposer. Cela en raison des scènes assez dures des tueries dans le village olympique perpétrées par ces palestiniens exaltés ; en raison aussi du fait que l'histoire est centrée sur celle d'un membre des services secrets israëliens dont la mission est de venger le massacre des 12 athlètes innocents massacrés. Tandis que le point de vue palestinien m'a, au premier abord, semblé être caricaturé et/ou ignoré.
Il n'en est rien.
Spielberg est honnête et sincère lorsqu'il déclare vouloir faire du cinéma pacifiste. Et il nous le prouve sans arrêt. Car après avoir dépensé son pognon, il choisit aussi de se contenter d'axer le sujet de son film sur un épisode qui a suivi les évènements de Munich ne prêtant pas à polémique : la réaction qu' Israël a eu dans cette affaire. Une réaction qu'elle a souhaitée rapide, impitoyable et largement affichée.
Honnête et sincère toujours, en nous rabâchant par la bouche d'un des terroristes que pour simplement exister, son peuple continuera bien évidemment à se battre jusqu'au bout pour ses quelques oliviers isolés sur leur tas de cailloux. Cela dans une séquence où, bien évidemment, Spielberg se contente de donner la parole à l'une des 2 parties sans chercher à la travestir ni à l'étouffer.
Par la bouche encore du héro de cette histoire, Avner l'israëlien, qui aura, à l'issu des efforts démesurés fournis et des risques insensés pris ; des risques qui auront coûté la vie à la plupart de ses amis, finit par comprendre, puis par dénoncer, et bien évidemment par se désolidariser de cette vengeance niaise et absurde, destructrice d'espoir comme d'avenir.
Spielberg nous le prouve enfin par LA CONCLUSION qu'il donne au film.
Il conclut sur le symbole du refus de partage du pain, ce symbole cher au peuple israëlien, et nous permet de mieux comprendre qu'à vouloir ce muer en peuple vengeur, ce peuple est tout simplement en train de perdre son âme et ses idées fondatrices, si ce n'est déjà fait.
Image forte, magnifiquement et dramatiquement appuyée par la vision des 2 tours jumelles encore debout dans la magnifique skyline de NYC qui vient clore l'oeuvre.
On sera privé du type de bonheur et d'émotion ressenti à la fin de La Liste de Schindler comme à la fin de tant d'autres de ses films. Mais ne soyez pas déçus, car ce n'est que le récit du réel, et dans cette affaire rien n'est malheureusement heureux.
Grâce à tout cela, moi je lui décerne une seconde médaille d'or, ainsi qu'un 10/10 dans la foulée.


Ouf, j'arrête, et pour bien finir une petite dédicace à Jonathan46 qui en 3 lignes et surtout en 3 mots à vraiment tout dit : un chef d' oeuvre.


...Tandis qu'à Paris, ce 9 janvier 2015, se sont déroulés sous nos yeux des évènements dont je souhaiterais bien qu'il se saisisse aussi pour poursuivre son magnifique combat pour la paix.

Walllou
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le 9 janv. 2015

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