Une communauté de l'être

J'ai partagé les dangers de la recherche quotidienne de la nourriture. Aucun peuple au monde n'est plus démuni qu'eux. Aucune autre race ne survivrait dans ces contrées, et pourtant ils étaient joyeux. Les gens les plus joyeux que j'ai jamais rencontrés. Ma seule raison de faire ce film était ma profonde admiration pour ce peuple.

Et ce sentiment d'identité commune s'ancre en nous, pour se transformer en expérience profondément libératrice lorsque nous réalisons qu'effectivement, nous ne faisons qu'un avec les autres et avec les choses. Mais c'est là le problème, que le moindre geste faux, la moindre once d'artificialité surviennent, et le fossé refait surface. À nouveau, on ne fait plus que regarder des gens sur l'écran et le sentiment d'identité commune s'envole. Il n'est plus possible. La magie du film Nanouk, l'Esquimau réside selon moi, dans le fait qu'ils sont eux-mêmes et qu'ils ne jouent pas la comédie. Ils sont.

Propos de Robert Flaherty rapportés par sa femme.

Les Esquimaux sont des peuples vivant au nord des continents. Ils vivent en harmonie avec le cosmos. Ils pêchent, construisent des igloos, mangent ensemble. Robert Flaherty dit que tout geste faux venant de sa part peut altérer une relation humaine vraie. Ils ne sont pas en concurrence. Les Esquimaux ne connaissent pas l'argent, ne connaissent pas l'échange, ils produisent ce dont ils ont strictement besoin et en fonction de leurs moyens. C'est pourquoi ils sont toujours joyeux. Plusieurs fois dans le film, nous les voyons en train de rire car ils ne connaissent pas l'angoisse moderne. L'être du devenir devra ressembler à cela.