Némésis est de la trempe de ces films dont l'absence d'identification d'objet en fait le charme, déployant ainsi dans un univers rebâtit une mythologie personnelle. Christophe Deroo réussit l'exploit technique (et avoué) d'avoir réalisé ce film sans moyens énormissimes et a du faire preuve d'ingéniosité pour certains plans. "La nécessité est mère est la mère de l'invention" après tout. Et pourtant, Némésis a tout l'aspect visuel d'un grand film. D'un très grand film. Bien coupé, bien cadré, Tout ça, tout ça.


[Ca va spoiler, gaffe]


Le scénario quant à lui offre une pluralité d’interprétations, dont la mienne s'est faîte à travers une grille de lecture freudienne.
En effet, on y retrouve plusieurs des éléments couverts par la psychanalyse. Il y a en effet Sam, ce personnage principal, qui serait ce "Moi", l'identité que chacun d'entre nous avons de nous-même. Ce "Moi" est présent à la fois dans l'espace conscient, mais aussi dans l'inconscient, ce qui nous intéresse ici. Le choix d'un paysage désertique vide de tout habitant n'est pas sans rappeler cette inconscient, vaste territoire nébuleux et atemporel, hors du temps profane donc. Puisqu'en effet, dans le film, le temps est différent. Il semble régit par cette lumière rouge dans le ciel, métaphore de la violence naissante. Violence qui trouve son origine via ce fameux 'Eddy' qui motive les troupes pour se jeter sur ce pauvre Sam.
Ce Sam, ce "Moi", est donc tourmenté par ce "Surmoi", instance inconsciente qui nous sert de Juge, qui nous punit ou nous récompense en fonction de nos actes, personnifié par "Eddy". Mais surtout, ce Juge interne sait nous tourmenter dans les cas de refoulement. Cela donne concrètement les névroses et autres troubles, qui ne sont qu'une torture psychologie créée par nous-même (et en nous-même). Le refoulement, c'est cette idée d'une chose inacceptable que l'on aurait fait et que, ne pouvant la supporter, nous aurions caché dans un coin de notre esprit. N'est-ce pas cela qui se passe avec l'enfant disparu du film, que Sam aperçoit brièvement au début à travers un trou, sous forme d'une poupée (transformation du cadavre en poupée pour ne pas se confronter à la réalité de l'horreur = refoulement) enfermée dans une chambre fermée par des chaînes, chaînes de l'esprit qui n'accepte pas la monstrusité ? Il aura fallu attendre que Sam se retrouve face à face avec le véritable cadavre, qu'il découvre cette horreur refoulée au fond de lui pour que finalement, son juge interne, le "Surmoi", Eddy, l'achève. Mais comme toute cure psychanalytique : une fois le Mal caché découvert, la rédemption et la guérison s'offrent à nous. Cette "happy-end", où tout semble revenu à la normal, n'est-ce pas là une métaphore du rétablissement ?

Chris-Hubert
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le 5 avr. 2017

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