Quand l'artiste Larrain peint l'artiste Neruda

Ma chronique à lire sur : http://reglisseaupaysdesmerveilles.blogspot.fr/2017/01/neruda.html


Ne connaissant pas Pablo Neruda , difficile de cerner ce qui relève de la fiction et de la réalité dans ce film de Pablo Larrain.


Les limites du film sont également ses qualités. En effet, Pablo Larrain peint Pablo Neruda en 1948 quand celui-ci passe dans la clandestinité pour être un fervent défenseur des idées communistes au Chili. Nous suivons donc les tribulations du sénateur politico-poétique artiste, Pablo Neruda, ce fils de cheminot devenu poète mondialement connu. Difficile de donner un sens à ce film. Où Pablo Larrain souhaite-t-il nous diriger? Cette question restera en suspens durant tout le film et encore après... Difficile de situer l'action, de réussir à lier les différents éléments, difficile de nous situer par rapport à cette histoire.
Pourtant, Larrain fait preuve d'une grande maîtrise. A la manière d'un tableau de Picasso ou plus justement d'un poème de Neruda, Pablo Larrain exerce son talent d'artiste par son travail cinématographique. A travers la caméra de Larrain, on suit ce "fugitif vicieux", cet intellectuel qui jouit de la vie incarné par un gourmand Luis Gnecco. Jeu impeccable de l'acteur qui se rapproche au plus près du fantasque Neruda. Découpé en plans situés chacun dans un décor différent, le film semble bancal. Fictif ou réel, un personnage secondaire et une voix mystérieuse off ajoutent une singularité de plus au film. Le commissaire Peluchonneau, joué impeccablement aussi par Gael Garcia Bernal, apporte une touche supplémentaire à l'ambiance surréaliste du film.


Pour résumer, imaginez une toile vierge, penché sur un support bancable. Scrutez le tableau, ce dernier ne représente encore rien et il est positionné de travers. Un homme entre dans la pièce : Pablo Larrain. Il se munit d'une caméra. Il lance petit à petit de minuscules tâches de peinture sur la toile. Sa manière de peindre aurait tendance à décrire un peintre qui ne réfléchit pas, qui n'a pas de but précis mais au contraire, c'est de l'art et tout est majestueusement pensé par le réalisateur. Il lance sa caméra, lance un micro, lance un scénario puis lance son talent en plein milieu de la toile. Cette toile, initialement vierge est petit à petit devenue difficile à traduire. La toile est toujours bancable mais pleine de couleur. Larrain y ajoute un discours prônant l'engagement politique de l'artiste, Larrain ajoute également une reconstitution historique inventive et une image moderne qui donne une représentation imparfaite de la fuite de Neruda. L'artiste Larrain laisse la place à l'artiste Neruda en mettant en évidence la force des vers du second : Poema triste est scandé à plusieurs reprises dans le film prenant à chaque fois une ampleur plus expansive.


Comme une oeuvre d'art, ce film est déroutant. Il ne laisse personne indifférent par son étrangeté et son ambiguïté.

thomaspouteau
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le 11 janv. 2017

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