Un monde malade

J'ai regardé Night Call après un bonne période d'hésitation, et bien m'en a pris, car ce film, s'il n'est pas grandiose, est tout de même d'une force assez impressionnante, autant du point de vue de sa forme que de son fond.
Night call, donc, comme l'appel de la nuit auquel Lou, Lou le solitaire, Lou l'inadapté, auquel Lou répond volontiers.
Night call, ensuite, comme ces appels que reçoivent policiers, ambulanciers ou pompiers, et que Lou intercepte.
Night call, enfin, comme un appel à l'obscurité, la plus sombre, celle qui donne des cauchemars, mais pas des cauchemars d'enfants, non, des cauchemars bien plus terrifiants, où les monstres ne sont plus sous le lit, mais dans la rue, où ces monstres sont payés pour faire ce qu'ils font. Un monde dans lequel tout se vend et tout s'achète, y compris le malheur des gens, un monde qui encense l'image, et plus particulièrement l'image choc.
Lou, donc,prend un plaisir indicible à filmer, à chaud, accidents de la route, fusillades et autres joyeuseté macabres, puis les revend à des chaines d'infos locales à côté desquelles BFM TV passe pour une chaîne de grand journalisme à l'éthique irréprochable (si si!). Il en vient même, (ce vilain garnement!) à organiser certains de ces événements, ce afin d'être aux premières loges.
Quel timbré se dit-on! Ils sont tous complètement fous! se rassurent-on. Seulement voila, on les regarde aussi, ces images, on est en haleine, et on viendrait même à développer une sorte d'empathie malsaine pour ce journaliste de l'enfer.
Et c'est là, je crois, tout la force de ce film. Car c'est moins un film qu'un miroir de ce que nous sommes, nous tous, obsédés par les images et les histoires sordides (et c'est encore mieux si elles vont ensemble!) Peut-être que ça nous rassure, peut-être qu'on se sent plus normaux, ou plus heureux, en voyant ce que d'autres vivent. Après tout, s'il y a de l'offre, c'est qu'il y a de la demande!