Saisir quelque chose d'éphémère, d'à la fois léger et tout à fait existentiel. Filmer un homme déambulant dans les rues, n'ayant aucun objectif en tête. Seules des pensées, plutôt négatives, subsistent dans l'esprit désorienté de cet individu. L'incertitude de sa relation avec sa petite amie (étrangement ressemblante à Jean Seberg dans À bout de souffle), la surprise de voir sa carte bleue avalée après que son père lui ait coupé les vivres, remarquer que le temps passe mais que sa vie, elle, n'avance pas. Bienvenue dans les vingt quatre heures de Niko à Berlin. Bienvenue dans Oh Boy.

Le premier long-métrage de Jan Ole Gerster dresse un hymne à l'art de l'anecdote, de l'embarras et de la nostalgie. Chacun d'entre nous vit de temps en temps de mauvais jours. Cela arrive à tout le monde, et c'est aujourd'hui le tour de cet ex-étudiant allemand. Le comique de situation et cet humour noir nous permettent de rire de ses malheurs. Il croise sur sa route des personnes solitaires, tristes. Mais le but n'est pas de rendre profondes ces rencontres. Le réalisateur ne les explique pas, et n'entre pas en détail dans les relations père-fils. Seuls quelques dialogues bien placés nous permettent de savoir dans quel contexte nous sommes.

Sans un excellent acteur ayant les épaules pour rendre ce film crédible, Oh Boy n'aurait pu être que du vent. Mais Tom Schilling répond présent en nous faisant directement entrer en empathie avec son personnage à la gueule de chien battu. Ressemblant à un antihéros de la nouvelle vague (nouvelle référence), la ville de Berlin et ses notes jazzy remplissent un second rôle capital. Si l'on note des clins d'œil au cinéma des années 1960, il faut toutefois différencier cette mise en scène allemande et celle des Godard ou Truffaut, qui n'ont rien à voir.

Quasiment sans téléphone portable pour essayer de donner au récit une dimension universelle, cette première œuvre en noir et blanc est atemporelle. Dans son parcours fait de rien mais surtout de tout, le cinéaste souhaite capter quelque chose d'ineffable, une sensation que l'on ne peut expliquer. Il réussit à saisir l'insaisissable : un sentiment de liberté absolue. Il faut rester positif et savoir qu'après l'orage vient le beau temps. Le café revient, et l'espoir renaît.
Hugo_Harnois_Kr
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le 10 févr. 2014

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Hugo Harnois

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