Quand on voit ce film, l'évidence est évidente: un tel mariage chansons-film est tout-à-fait possible et même recommandé. Comment se fait-ce qu'on n'y ait pas pensé plus tôt ? Toute une représentation de notre patrimoine musical est déployée: "Avoir un bon copain", "Paroles,paroles", "Résiste" comme une philosophie, du Claude François, Gainsbourg-Birkin présents, un petit clin d’œil à Léo Ferré, et même du Téléphone (ce qui m'a agréablement surpris, vu que Resnais n'est pas vraiment réputé pour attirer les jeunes). Utilisées comme des dialogues à part entière (mais rarement), comme des traductions de pensées (plus fréquemment) ou simplement comme vérités enfouies, ce sont elles qui portent à bout de bras ces portraits d'hommes et de femmes. Ce sont elles, aussi, qui transfigurent leur malheur, leurs drames cachés par leur enthousiasme musical. C'est un film qui fait semblant, qui joue un rôle lui-même, celui d'un film musical résolument fort. Mais c'est pas le cas, c'est un film sur la dépression et la fatalité de nos sorts. On ne s'en rend pas bien compte, parce qu'on s'attache à tous les personnages (en particuliers André Dussoliers pour ma part, très touchant), et comme nous tous, ils parviennent à cacher leurs blessures et leurs envies secrètes tous les jours. C'est un film pour et sur les gens, à la fois remotivant et désespéré. A chacun d'y voir ce qu'il veux y voir. Comme dans une chanson, tout est lié ! Une nouvelle façon de raconter est née avec ce film, et est restée avec ce film. Un très beau film.