On l'appellera aussi et surtout un très bon film !
Imaginez une surprise italienne qui, plutôt que de renier ce style très européen où se mêle un univers violent rempli de personnages déjantés à un certain ancrage dans la réalité, le ferait fondre dans l'ossature archétypale d'un film de super-héros et secouerait le tout dans un shaker avec quelques litres de Danette à la vanille en guise d'accompagnement !
Voilà, vous avez une vague idée de ce à quoi ressemble "On l'appelle Jeeg Robot" et c'est bien cette force d'utiliser les codes super-héroïques dans un contexte ne leur correspondant absolument pas qui fait tout le sel du film de Gabriele Mainetti.
Les origines des pouvoirs, la découverte qui en découle, le choix éternel de les utiliser pour le bien ou le mal, un événement dramatique pour trouver la bonne voie, l'inévitable affrontement final contre un super-vilain,... Tous ces passages obligés du film de super-héros se retrouvent dans "On l'appelle Jeeg Robot" mais sont ici placés au sein du monde cruel et semi-réaliste des petites frappes du banditisme italien qui leur donne une toute autre perspective que l'angle habituel des blockbusters habituels US par exemple.
Voir Enzo, un voyou sans envergure et à la limite de la misanthropie totale être amené à embrasser un destin de super-héros n'est la chose la plus habituelle des standards du genre, d'autant plus que, pour renforcer son côté hybride, le film lui colle deux obsessions plus qu'étranges : les films X et la Danette (oui !). Ce sera d'ailleurs une des mimiques les plus astucieuses du long-métrage : mixer constamment une déviance adulte à un détail plus puéril et pousser le côté incongru du résultat jusqu'à un certain paroxysme pour créer des ressorts aussi bien cartoonesques que dramatiques. Cela se révélera bien évidemment très amusant avec le grand méchant du film "Le Gitan", un petit gangster déjanté qui se rêve parrain (car obsédé par la célébrité du fait d'un passé de star de la télé-réalité) et fan un peu trop jusqu'au-boutiste de variété italienne, ou ses compères affublés de surnoms ridicules mais cela ajoutera aussi une réelle profondeur avec Alyssa, la voisine d'Enzo, réfugiée dans un comportement infantile (c'est elle la fan du dessin animé japonais "Jeeg Robot") pour échapper à un passé terriblement douloureux, elle deviendra peu à peu la clé de voûte du destin de ce curieux super-héros en devenir et leur relation à la fois tendre et conflictuelle sera une lueur d'humanité véritablement émouvante qui traversera l'ensemble du film.
À l'heure où Marvel et DC règnent en maître sur le genre super-héroïque en faisant disparaître le nombre de propositions US plus atypiques ("Super", "Defendor" ou même "Kick-Ass"), "On l'appelle Jeeg Robot" fait figure d'exception, un OFNI venu d'Italie qui fait un bien fou en redéfinissant le mythe du super-héros dans une réalité où le héros humain, lui, n'a pas grand chose de super. Évidemment, à l'image de son méchant supra-caricatural, le trait est grossi à l'extrême dans la violence et l'humour noir pour ne pas oublier de livrer un excellent divertissement au passage mais l'intelligence dont fait preuve "On s'appelle Jeeg Robot" pour remanier des codes dont on croit tout connaître dans un monde quand même pas si loin du nôtre lui octroie indiscutablement le caractère de petite pépite du genre.