Autant le dire tout de suite, Nicolas Winding Refn m’a conquise. L’esthétique de ses plans, sa technique, ses choix au niveau visuel me bluffe et me font vraiment entrer dans un univers presque parallèle où la réalité n’a plus court. Malgré tout, en sortant de la salle, j’ai eut du mal à donner un avis posé et tranché sur le film. J’avais grand besoin d’y réfléchir et d’en discuter. Après toutes ces heures à parcourir diverses critiques et à penser le film, voilà ce qui en ressort.

Comme pour son précédent long métrage, « Drive », NWR use de peu de dialogues et pourtant cela ne gêne nullement. L’image, les expressions faciales des personnages, la bande sonore, va remplacer les mots et donner d’autant plus d’impact aux scènes. Attention à ceux qui s’attendait à voir un film suivant la même lancée que « Drive ». Ce n’est pas le cas. Dans « Only God Forgives » pas de musique électro à laquelle se raccrocher, pas de morceaux qui donne le tempo. La bande son colle à l’environnement sombre du film. En fait, dès le début, la musique peu présente fait plutôt écho aux sons de la vie : voitures, bruits de pas, vêtements froissés… Bref. Cela ne fait que renforcer un côté très intime et oppressant qui ne nous quitte plus. Un certain malaise s’installe presque immédiatement et on sent très vite qu’on ne sortira pas tout à fait indemne de ce voyage. De même, le choix des couleurs n’est pas anodin. Après tout, ne dit-on pas que le rouge est synonyme de passion ? Et la passion dévore l’humain jusqu’à la mort. Le rouge c’est aussi le sang et donc la guerre, la violence, la colère. Ce cocktail destructeur qui fait le film.

J’ai également été frappé, très tôt dans le film, par les plans qui sont, à mon sens, d’une beauté sans nom. La caméra se fige durant de longues secondes sur les personnages et NWR a réussi à capter leurs expressions les plus profondes et intimes. L’utilisation des ombres, (en particulier lors des scènes dans la salle de boxe avec Julian interprété par Ryan Gosling) ne fait qu’accentuer le côté très noir des personnages.

Enfin, pour en venir au scénario (peu développé certes mais qui tient plus du fil conducteur obligatoire pour emmener le spectateur d’un point A à un point B) : derrière la vengeance et la violence qu’elle génère, on découvre des personnages fragiles qu’un rien peut faire plier. Le réalisateur a réussi à faire passer une histoire peut-être « basique », en tout cas déjà vu, à quelque chose de bien plus profond qu’il faut creuser par soi-même. Ses personnages ne sont finalement pas animés par la seule soif de vengeance et de sang mais plutôt par la peur, l’impuissance et l’envie de montrer aux autres que l’on est suffisamment digne. On retrouve ainsi Julian qui, selon moi, va poursuivre cette vengeance familiale dans le seul but d’être, peut-être, enfin reconnu par sa mère qui ne cesse de le rabaisser. On découvrira finalement à la fin que Julian était, sans doute, le personnage le plus lucide et sincère de l’histoire. Il est le seul à accepter la fatalité, son destin et à en assumer les pleines conséquences. Quant aux autres, tous pensaient être au-dessus des lois. Tous pensaient être des Dieux et que, par conséquent, rien de mal ne pourrait leur arriver. Hélas, sur Terre il n’y a pas de Dieux et quiconque croit en être un doit en subir les conséquences. Oui, mais alors pourquoi ce flic n’est pas puni ? Serait-ce possible que le divin soit descendu parmi nous ? En tout cas, il apparait comme un juge que rien n’atteint et qui fera son devoir quoiqu’il advienne.

There is only one God. And he does not forgive everyone.
Rivendell
7
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le 24 mai 2013

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le 24 mai 2013

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