Ceci n'est pas qu'une oeuvre esthétique.
Le monde semble avoir choisi : voir ce film comme une coquille vide au scénario superficiel, ou le voir comme un ovni bénéficiant d'une réalisation artistique qui dépote.
Ce n'est bien entendu ni l'un ni l'autre. Oserais-je implorer mes condisciples cinéphiles de ne pas se laisser aller à leur (bien légitime) habituel réflexe cartésien de séparation de la fond et de la forme ? Ce serait là un faux-pas.
Only God Forgives est un de ces films qui vous amène une vision sur l'homme (l'humain) dans des détails non langagiers. On pourra y voir la capacité du réalisateur à communiquer les états mentaux des personnages juste en filmant leur regard au ralenti, mais ça va bien plus loin. Schéma familial délirant du personnage de mister Gosling - sur lequel le film a la finesse de vous laisser vous pencher sans le souligner au fluo ; ou encore incarnation d'un duel entre un colonisé qui se reprend façon radical versus un colonisateur repus de ses privilèges : choisissez votre approche.
Mais dans tous les cas vous aurez affaire à des psychologies finement présentées et ciselées qui n'ont rien à voir avec une soif de puissance ou de violence brute - si celle-ci se manifeste, c'est afin d'être instrumentalisée pour assouvir des motivations autrement plus profondes. Fond et formes sont en adéquation, encore faut-il s'autoriser à lire la forme pour ce qu'elle est. Il n'y a dans le film aucun plan inutile, pas même celui de la contemplation des mains.