Les premières scènes sont surprenantes, un léger malaise s’installe et des rires fusent. Je suppose que la plupart des spectateurs s’attendaient à un long métrage traditionnel, avec plus de dialogues et de… scénario. Je suis un peu désarçonnée, je ne m’attendais pas à un film de genre. A voir la bande-annonce, j’avais compris qu’il y aurait beaucoup de violence, aussi bien morale que physique, du sexe, une problématique malsaine et une ambiance glauque.
J’étais au courant. J’ai signé pour ça.
Au terme de la séance, j’étais déçue. Je voulais du dynamisme, quelque chose d’envoutant, où j’aurai pu me perdre, m’oublier. Mais j’ai eu cette impression désagréable que quelque chose n’avait pas fonctionné, qu’on nous avait volé.
Prises individuellement, j’ai pourtant aimé la plupart des scènes. Et avec le recul nécessaire je ne peux pas trouver de défaut à la réalisation, au jeu des acteurs ou à l’histoire même. L’étrangeté ressentie durant cette heure et demie est voulue, tout comme le fait qu’on n’arrive à s’identifier à aucun personnage. J’y repense, je retourne le problème dans tous les sens, et plus je le fais, plus je me dit que le film est parfait. Parfait dans le sens où il semble coller exactement à ce que voulait faire Nicolas Winding Refn, et que c’est maintenant qu’il m’envoute.
Les passages les plus forts, les plus incongrus me frappent. Je revois ce vieux policier chanter ces chansons d’amour dans un karaoké kitch, je revois les bordels aux thèmes insolites, les sourcils froncés de Maï, les talons vertigineux de Kristin Scott Thomas, et ce katana.
Je comprend la génèse de cette famille de criminels, et si elle avait été présentée autrement, sans ces lumières rouges, sans cet esthétisme incroyable et ce côté théâtral, elle aurait perdu de son impact.
Car après tout, on pourrait résumer ceci très simplement, en quelques phrases, et tout s’écroulerait. Mais enrobé comme cela, dans cet univers onirique, visuellement impeccable on se sent flotter. On est omniscient, on ne connait pas la pudeur, la honte ou les convenances, on voit tout, on entend tout et on sait tout. Et c’est la que la maxime du titre prend tout son sens.